Vers un temps proche du record

Banque populaire Peyron
DR

Les 30 derniers milles autour de la Guadeloupe constitueront l’ultime piège : depuis 36 ans, bien des rêves de podium se sont  brisés dans les dévents de Basse Terre. A Pointe à Pitre, où l’organisation, les équipes et la presse se préparent à recevoir les marins, le temps est actuellement pluvieux et orageux, avec un vent changeant en force et direction. Si cette météo se maintient, elle participera sans doute au suspense final. Pour crier victoire, il faudra donc patienter une trentaine d’heures, jusqu’à lundi au petit matin. Même si Peyron répète à l’envi ne pas se soucier du temps de référence de la course (7 jours et 19 heures), les hypothèses hautes des heures estimées d’arrivée voient un terminus à Gosier lundi au petit matin (heure métropole). Le record de Lionel Lemonchois établi en 2006 est donc à la portée d’étraves. Pour cela, Loïck devra couper la ligne avant 7h19 lundi matin.

- Publicité -

Quoi qu’il en soit, avec des moyennes journalières de 4 à 500 milles pour les grands trimarans, quatre à cinq Ultimes sont susceptibles de terminer leur transat dans la seule journée de lundi.  La deuxième place semble promise à Spindrift2. Yann Guichard, dans le sillage du leader, est lui aussi en route quasi directe vers l’arc antillais. Ce matin, il décrivait pourtant toute la difficulté de cette dernière ligne droite, l’obligation d’être vigilant dans les surventes et d’adapter la toile entre les grains, malgré la fatigue. 170 milles derrière Spindrift2, la bagarre risque d’être torride pour l’accession à la 3e marche du podium. Le 80 pieds Prince de Bretagne (Lionel Lemonchois) et le « petit » 70 pieds Edmond de Rothschild (Sébastien Josse), décalé dans son sud, ne sont séparés que d’une trentaine de milles.

Lionel Lemonchois sur Prince de Bretagne

 

Dans le sud des Açores,  à plus de 1000 milles de la tête de course, Imoca et Multi50 font jeu égal. Les leaders de ces deux classes évoluent non loin les uns des autres, dans un vent de nord-est, en marge de l’anticyclone. Point commun supplémentaire entre ces deux catégories : de beaux duels en tête. Gabart (Macif)/Beyou (Maître Coq) chez les monocoques et Le Roux (FenetréA-Cardinal)/Roucayrol (Arkema-Réhion Aquitaine) à touche touche chez les multicoques.

 

Jérémie Beyou sous les alizés

 

La majorité de la flotte des Class40 progresse sous spi dans l’ouest de Madère. Mais cette navigation au portant n’est pas une sinécure et rappellent à certains l’atmosphère du pot au noir : grains orageux, trous de vent, fortes rafales. L’option au large adoptée depuis plusieurs jours par Kito de Pavant (Otio-Bastide Medical) porte ses fruits. Le Méditerranéen est aux commandes avec plus de 35 milles d’avance sur Yannick Bestaven (Le Conservateur) et Alex Pella (Tales 2 Santander). A noter dans cette classe le démâtage (hier soir) du Britannique Conrad Humphreys (Cat Phones) qui fait route vers le Portugal en attendant d’être ravitaillé en carburant et le (re)départ de la Corogne du Guadeloupéen Nicolas Thomas (Guadeloupe Grand Large-1001 Batteries), en compagnie de Luc Coquelin (Guadeloupe Dynamique/Class Rhum).

Chez les Class Rhum, c’est le grand écart entre les deux bateaux de tête : le tenant du titre, l’Italien Andrea Mura (Vento di Sardegna – en mono) qui navigue très au large, dans le sud-est des Açores et Anne Caseneuve (ANEO – en multi) au milieu des premiers Class40, dans l’ouest de Madère.

Ils ont dit

Yann Guichard, Ultimes, Spindrift 2 : « Les vents sont instables, je suis passé de 15 à 0 nœuds en 30 secondes au petit matin. C’est vrai que l’alizé est faible et il y a pas mal de zones orageuses et de zones sans vent. Demain j’espère que ce sera plus stable. C’est très bien car on pourra un peu se reposer. Il faut faire attention car avec la moindre risée qui arrive c’est compliqué sur Spindrift 2. Il peut être vite déséquilibré et ce n’est pas facile de bien régler le pilote. C’est sûr que physiquement c’est dur. Encore 2 jours de mer. C’est bien mais il n’en faudrait pas 5. Je serai fatigué mais heureux d’arriver. »

Erwan Leroux, Multi50, FenêtréA-Cardinal : « Ça ne se passe pas très bien pour moi. Outre le fait que cette nuit, Lalou m‘a repris une vingtaine de milles, ce matin, je me suis mis dans une molle et pour finir j’ai eu un souci de pilote.  J’ai dû rouler le gennaker ce qui m’a fait perdre quelques heures. Le principal c’est que ce soit réparé et que cela fonctionne. Les Multi50 n’ont pas navigué aux vitesses « normales » qui sont habituellement plus élevées, donc ce n’est pas surprenant que l’on soit avec les IMOCA. C’est hyper difficile car tu passes d’un état bien à un état où t’es bon à être ramassé à la petite cuillère. C’est la course au large. C’est la course en solitaire avec son lot de joies et de peines… »

Louis Burton, Imoca,  Bureau Vallée : « On essaye d’abattre pour gagner dans l’ouest, on est à 15.5 nœuds. Je pense qu’il y a un peu plus de vent là où je suis mais j’ai des problèmes informatiques donc je n’ai pas les positons des autres bateaux et pas de fichier météo à jour. Je sais qu’Armel  (Tripon) a empanné aussi dans le secteur. Je pense qu’on aura plus de vent par-là que ceux qui sont plus à l’Ouest. L’idée c’est de tenter autre chose.»

Kito de Pavant, Class40, Otio – Bastide Médical : « Cela fait déjà quelques jours que je n’ai vu ni lune ni soleil. On traverse une espèce de zone de crachin bien désagréable qui fait suite, je suppose, au passage récent d’un thalweg. La météo est facétieuse  et je fais bien attention à ne pas rentrer dans une zone plus Sud où l’anticyclone a du mal à se reconstruire. J’empanne dès que cela mollit un peu. Pour l’instant, cela me réussit plutôt bien… »

Yann Eliès (Ultime) : « J’ai un souci avec le safran bâbord et j’aimerais bien qu’il reste un morceau d’ici l’arrivée même si normalement le bâbord d’ici 24h, il n’y en aura plus besoin. Il faut donc qu’il tienne encore une journée… J’imagine que c’est la face extérieure, il doit manquer un bout en haut du safran, mais je n’ai pas pu aller voir car il y a un peu de mer. On bénéficie derrière de bonnes conditions par rapport aux premiers car ils ont eu des alizés assez faibles. J’ai encore pas mal de doutes sur les choix de voiles, les réglages mais c’est normal, je suis encore novice. Je suis à 600 milles derrière les premiers. Si je n’avais pas eu de problèmes techniques à un moment crucial avant Madère, j’aurais été derrière mais pas si loin que ça… Pour l’instant c’est une petite déception. »

Armel Tripon (IMOCA) : « Le bateau est à plat : c’est sympa. C’est plaisant de pouvoir naviguer sans pencher. On est en bordure d’anticyclone. Il peut encore y avoir beaucoup de changement : il reste 2000 miles. Il y a les prévisions puis ensuite pas mal d’aléas donc il faut rester vigilant et opportuniste. Le vent de cette nuit n’était pas prévu aussi fort par exemple. C’est la première fois que je passe une si longue distance en mer avec ce bateau ! »

Yves Le Blévec (Multi50) : « On a une nuit à rattraper donc vaut mieux aller vite ! Ca se passe bien. J’ai un bateau rapide et c’est plus facile. Il fonctionne bien et je fais tout pour bien avancer. On a de bonnes conditions et on fait tout pour y rester. La mer est sympa, plate avec un vent stable : 15-20 nœuds, on va flirter avec le centre de l’anticyclone et ça va ralentir. Maintenant on a la position des camarades rafraichie toutes les heures, ce qui permet de bien voir ceux qui avancent et ceux qui n’avancent pas. »

Classement de 16h
Ultime
1 MAXI SOLO BANQUE POPULAIRE VII Loick Peyron  à 757,6 milles
2 SPINDRIFT 2          Yann Guichard à 185,57 milles
3 PRINCE DE BRETAGNE    Lionel Lemonchois à 347,68 milles

IMOCA
1 MACIF         Francois Gabart à 1872,9 milles
2 MAITRE COQ         Jérémie Beyou  à 25,32 milles
3 SAFRAN      Marc Guillemot à 101,35 milles

MULTI50
1 FENETREA – CARDINAL  Erwan Leroux    à 1885,4 milles
2 ARKEMA REGION AQUITAINE  Lalou Roucayrol à  0,28 milles
3 RENNES METROPOLE – SAINT MALO AGGLOMERATION   Gilles Lamire à 88,78 milles

CLASS40
1 OTIO – BASTIDE MEDICAL Kito De Pavant à 2485,9 miles
2 LE CONSERVATEUR Yannick Bestaven à 36,22 milles
3 TALES 2 SANTANDER Alex Pella à 37,16 milles

RHUM
1 VENTO DI SARDEGNA     Andrea Mura à 2392,4 milles
2 ANEO  Anne Caseneuve à 27,86 milles
3 TRADYSION GUADELOUPE Willy Bissainte à 250,68 milles