Hier vers 17h30, le monocoque Generali de Yann Eliès a retrouvé l’élément liquide après 90 jours de chantier hivernal. L’opération s’est parfaitement déroulée et c’est un monocoque en configuration Vendée Globe qu’a présenté Yann Eliès. L’essentiel des travaux a répondu à trois axes d’amélioration : chercher à gagner du poids, améliorer l’ergonomie intérieure et extérieure, optimiser la sécurité et la protection du skipper.
« Nous avons gagné environ 300 kilos », explique Yann Eliès, « des poids essentiellement économisés dans le mât – où plutôt les pièces qui tournent autour du mât– et dans le bulbe de quille. Nous avons fait fabriquer un nouveau mât, dans le même esprit que le précédent, toujours avec trois étages de barres de flèche, mais plus léger et plus performant. Lorima, le fabricant, a fait un gros effort en acceptant de fabriquer un moule spécial ».
Casquette coulissante
et barre franche
Pas question pour autant de lésiner sur la sécurité. Yann Eliès le répète : son objectif c’est le Vendée Globe, « et pour gagner un tour du monde, il faut d’abord le finir ». L’avalanche d’avaries sur la Barcelona World Race et, dans une moindre mesure, la Transat B To B l’a conforté dans ses choix : « certaines équipes étaient sans doute allées trop loin dans la recherche de légèreté ». Generali, lui, a fini toutes les courses auxquelles il a participé. « Du coup, nous étions peut-être un peu trop lourds, d’où ce gain de poids que nous avons fait avec l’obsession d’alléger sans perdre en fiabilité. »
Côté sécurité, de nouveaux chandeliers ont été installés, plus hauts, pour permettre au skipper de se déplacer sans appréhension sur le pont. Côté protection du marin, la principale innovation est une casquette de rouf coulissante à hublots, qui permet de barrer au sec, à l’abri des embruns. Chose rendue possible également par l’abandon du système de barres à roue au profit d’une seule barre franche centrale. Un système qui présente aussi l’avantage de libérer beaucoup d’espace dans le cockpit, ce qui permet par exemple de matosser des voiles en arrière de la barre. En outre, cela libère aussi de la place à l’intérieur du bateau dont les flancs deviennent ainsi intégralement disponibles pour le déplacement des poids, le matossage, «travail qu’on ne voit pas mais qui représente un tiers de la dépense énergétique d’un marin en solitaire », rappelle Yann Elies. La console centrale avec le réchaud a été suspendue, toujours dans ce but. L’ensemble donne un Generali plus dépouillé, plus protecteur, visiblement plus sain… et on le souhaite, encore plus rapide. Premier test grandeur nature : la Transat anglaise en solitaire – The Artemis Transat – dont le départ sera donné le 11 mai prochain à Plymouth (GB).
Déjà qualifié pour le Vendée Globe, Yann Eliès n’aura pas de pression particulière, si ce n’est celle inhérente à une course que l’on sait difficile en solitaire à cette saison. « Si le Vendée Globe est l’Everest, la Transat anglaise est le Mont-Blanc par la face nord », rappelle le skipper de Generali.
Trois questions à Yann Eliès
Yann, que représente cette mise à l’eau après trois mois de chantier ?
C’est un moment important. Cela veut dire qu’on va bientôt retourner sur l’eau et c’est agréable : car si le chantier fait partie du métier, on fait tout de même cela d’abord pour naviguer. Remettre le bateau à l’eau veut dire qu’on y retourne bientôt ! Toute l’équipe a fait du beau boulot, je suis vraiment heureux du résultat.
300 kilos de gagnés… et si les autres teams en avaient fait autant ?
Pour ceux qui sont déjà allés très loin dans ce domaine – trop loin parfois comme l’ont démontré les avaries sur la B to B et la Barcelona – ce ne serait pas très raisonnable… Notre philosophie a toujours été de privilégier la fiabilité d’abord et je constate que nous avons terminé toutes les courses auxquelles nous avons participé.
Es-tu rassuré sur les performances du bateau ?
Oui. Ces travaux d’hiver vont dans le sens d’une meilleure performance. C’est vrai que j’ai eu des moments de doute, pendant la Transat Jacques Vabre. Tu gamberges forcément, tu te demandes si tu as fait les bons choix, si tu n’es pas trop lourd. Mais la Transat B to B (4e, ndr) m’avait déjà beaucoup rassuré, puisque je m’y suis battu avec les meilleurs, malgré des voiles d’avant déchirées. Aujourd’hui, je n’ai peut-être pas le bateau pour gagner la Transat Jacques Vabre, mais je sais que j’ai un bateau qui peut gagner le Vendée Globe… en tous cas le terminer. J’ai un bateau de tour du monde. Et le Vendée est mon grand objectif.