Mini-Transat. Benoît Marie deuxième en proto : “Le record c’est mon lot de consolation !”

Arrivée de Benoît Marie (FR), second de la 2e étape et du général de La Boulangère Mini Transat 2025 (avant jury) à Saint-François (Guadeloupe / FR) V OLivaud

Benoît Marie a coupé, en deuxième position, la ligne d’arrivée de La Boulangère Mini Transat 2025. Grand favori de la course après avoir remporté toutes les courses d’avant-saison, il manque le doublé à quelques milles de l’avarie suite à des avaries sur son bateau qui aura battu le record de vitesse en Mini.

- Publicité -

Si la déception est là, elle est néanmoins vite ravalée. Souriant et disert à l’heure de rejoindre le ponton où l’attend un chaleureux comité d’accueil, Benoît partage son plaisir sincère d’avoir vécu une aventure océanique exceptionnelle, qui l’a vu battre le record de vitesse avec 352,59 milles parcourus en 24 heures, à 14,69 nœuds de moyenne. “ C’est mon lot de consolation”, convient-il à l’arrivée.
Ces chiffres vertigineux apportent la preuve irréfutable qu’il est possible de voler au large bord d’un Mini 6.50. Ils témoignent du formidable bond en avant qu’incarne le prototype Nicomatic-Petit Bateau, concentré d’innovations, développé depuis plusieurs années déjà par Benoît et sa femme Caroline Boule, en collaboration étroite avec l’architecte naval Sam Manuard.

Et si Benoît, qui a remporté toutes les courses d’avant-saison, cumulant avec panache les réussites à la barre de ce foiler au potentiel spectaculaire, seule cette Mini-Transat 2025 qu’il avait pourtant si bien entamée, lui aura finalement résisté. La faute à une première avarie sérieuse – la casse de son foil tribord cinq jours après le départ -, qui le freinait net dans son élan après avoir construit une solide avance sur le reste de la flotte. Cette fortune de mer permettait alors à Mathis Bourgnon, auteur d’une course quasi-parfaite avec son bateau archimédien, d’en tirer avantage pour réduire irrémédiablement son retard sur ce premier de cordée fragilisé.

Un doublé manqué

On connaît désormais la suite avec la casse, hier, de son bout-dehors générant un trou dans la coque au niveau de l’étrave, et privant le 1067 de son spi dans l’ultime bataille d’empannages pour rallier Saint-François. Alourdi par 400 litres d’eau à l’avant, Benoît ne pouvait plus rivaliser face à son poursuivant immédiat, toujours plus incisif, qui finissait par le doubler en approche de l’île papillon.
Le skipper-ingénieur de 38 ans perd alors tout espoir de signer un doublé sur cette course qu’il a remportée en 2013, à laquelle il est profondément attaché. Beau joueur, en dépit de son immense déception, celui qui concède au final un retard de près de quatre heures à l’arrivée, ne manque pas de féliciter Mathis Bourgnon, dont il salue la course.
Benoît Marie fait aussi part du flot d’émotions qui l’a envahi à l’entame du parcours pour rallier la Guadeloupe, alors qu’il avait tout juste fait la connaissance de son fils, né quelques jours avant le coup d’envoi à La Palma. Autant de bonnes raisons de garder un souvenir impérissable de cette Mini 2025 qu’il a animée de bout en bout.

Les chiffres de la course de Benoît Marie (avant jury)

Le skipper du 1067 Nicomatic – Petit Bateau a coupé la ligne à 8h 21’57’’ , heure locale (13h 21’ 27’’, heure Paris) ce samedi 8 novembre après 13 jours 21 heures 21 minutes et 57 secondes de course à 7,82 nœuds . Il concède 3h57’12’’sur le premier Mathis Bourgnon sur le parcours théorique de 2 613 milles entre Santa Cruz de La Palma (Canaries) et Saint-François (Guadeloupe).

INTERVIEW 

Quel est ton sentiment aujourd’hui ?

« Je me sens bien parce qu’on est en Guadeloupe, il fait beau et il n’y a pas beaucoup de monde devant moi. Il y a un sacré champion, bravo Mathis ! Tu as fait une course incroyable, et merci de m’avoir poussé comme ça. C’est incroyable ce que tu as fait ! »

Tu as été longtemps en tête, …

« Il y a forcément un peu de frustration, je dois l’avouer quand même. Les dernières 24 heures ont été dures à vivre, parce que j’ai tout cassé : le bout-dehors, le bateau, la crash-box… Ce n’est pas agréable. J’ai l’impression d’avoir fait souffrir mon compagnon, et je n’aime pas ça. Je n’étais pas au niveau de performance que j’aurais voulu, et Mathis a trouvé la brèche et s’y est engouffré. C’est le sport, c’est la compétition, c’est ce qui est chouette. Arriver ici, dans ce lagon de Saint-François que je connais bien, ça fait réaliser qu’on a traversé l’Atlantique sur un tout petit bateau, et ça, ce n’est pas rien. »

Tu as eu conscience de battre le record de distance sur 24h00 ?

« Je crois que j’ai explosé le record, avec près de 353 milles : c’est pas mal ! Ça fait 14,9 nœuds de moyenne, c’est bien. Désolé Caro (Caroline, son épouse, détenait le précédent record), mais nous sommes mariés, et ce qui est dans le couple reste dans le couple. »

Quelle image gardes-tu de cette transat ?

« C’était un kiff absolu, cette transat. Voler au large comme ça, de jour comme de nuit, sous pilote, c’était exceptionnel. J’ai vécu 13 jours formidables, je me suis éclaté, j’ai pris un plaisir complètement fou. Battre le record, c’est chouette, c’est une étape en soi. C’est mon lot de consolation ! Je suis content d’être là, et je pense que Mathis a été meilleur que moi sur la course, au final. Il mérite amplement sa première place, et je suis très fier d’être derrière lui. »

Peux-tu revenir sur tes avaries ?

« Ça a commencé avec le foil tribord qui s’est désolidarisé du bateau (…). Le foil est sorti et a déchiré une partie de la coque. J’ai eu une voie d’eau énorme : j’ai tout affalé en catastrophe pour réparer, sécuriser le bateau, vider l’eau, colmater. C’était un peu chaud, car je n’étais pas très loin du Cap-Vert. J’ai hésité à repartir vers le Cap-Vert ou à tenter ma chance. Il était hors de question d’abandonner, et je n’ai pas hésité très longtemps. Ça, c’est la première avarie. La deuxième, c’est hier midi : j’ai fait un gros planté. Tout l’avant du bateau est passée sous l’eau et, au bout d’un moment, le spi a pété. Le bout-dehors est passé sous le bateau (…). Ça a fait quelques dégâts, et j’ai fini avec la crash-box pleine d’eau. En quelques mots : le bateau a bien souffert, mais j’ai pris beaucoup de plaisir. »

Tu es devenu papa juste avant le départ de la deuxième étape ?

« C’était très dur à vivre, Le lundi précédant le départ, mon fils est né. J’ai pu le rencontrer et j’ai débordé d’émotions. Je ne m’attendais pas à ça et j’ai du partir le lendemain matin pour Palma. C’était un déchirement. J’ai eu du mal à m’en remettre, je ne m’attendais pas à ce que ce que soit une telle décharge d’émotions et que ça dure aussi longtemps. »