Empannages à répétitions, changements de voiles anticipés à tort ou à raison selon l’apparition ou la disparition des grains orageux, le gain vers le sud et les régimes soutenu d’Est, puis de Sud-Est qui baignent la zone équatoriale est laborieux. En repartant vers l’Est, Yves Le Blevec a annulé le décalage en longitude qu’il avait créé avec des poursuivants désormais organisés en véritable meute. Il dispose toujours d’un matelas d’une trentaine de milles qu’en costaud, et sûr de sa carène taillée pour les allures de "reaching" travers aux alizés, il sera le premier à faire fructifier. A moins que les longues heure de manoeuvres dans la pétole n’aient entamé l’homme ou le matériel…
Dans le sillage d’un Adrien Hardy (Brossard) connu pour sa ténacité, c’est tout un groupe de marins tout aussi teigneux qui vient, hasard de la navigation sans assistance extérieure, de se retrouver sur un petit périmètre d’Atlantique, pour crier sus à Le Blévec. David Sineau (Bretagne Lapins), à 3 petits milles d’Adrien, aperçoit entre les grains et sous son vent l’Australien Nick Brennan (Rafiki), lui même "couvert" par un remarquable Ronan Deshayes (PCO technologies). Ces quatre hommes qui ne connaissent de la position du leader que sa distance au but communiquée chaque jour par la direction de course, doivent à l’évidence partager ce matin un euphorisant moment de satisfaction. A 1 300 et quelques milles du but, c’est un sprint totalement débridé qui s’annonce entre des marins décidés à ne rien lâcher. Les prochaines heures seront cruciales. A l’approche des 5 degrés de latitude Nord, tous les fichiers s’accordent à voir l’établissement par l’Est, tournant progressivement au Sud-Est, d’un alizé tonique. Le train de Salvador s’annonce. Malgré la fatigue et la lassitude d’une lutte sans repos dans la moiteur du Pot au Noir, il faut à chaque coureur conserver l’énergie et la lucidité pour accrocher le bon wagon. A suivre la trajectoire de Yann Riou (Caméléon). Longtemps au vent de la flotte, il parait en mesure de recoller au groupe de chasse. Derrière, entre l’américain Clayton Burkhalter (Acadia) le plus occidental, et le belge Peter Laureyssens (Ecover), le plus oriental sur le plan d’eau, le bout du tunnel est encore loin et les écarts pourraient à nouveau se tendre comme un élastique dès que la tête de la flotte entrera dans le flux alizéen. Et les leaders en Série, les inséparables Stéphane le Diraison (Cultisol-Institut Curie) et Hervé Piveteau (Jules-Imprimerie Cartoffset) sont aussi logés à cette enseigne.
Toujours en escale à Mindelo, dans l’archipel du Cap Vert, Aloys Claquin (Vecteur Plus), tente de trouver un nouvel axe de safran. A l’exception de Sébastien Gladu (Clichy sous bois-Clichy sur l’eau) et Hugo Ramon (Volkswagen Sailing experience), toute la flotte a dorénavant passé les portes de l’archipel capverdien.