Excès de vitesse sur la route des Sables d’Olonne

Douguet
DR

Ca y est, les solitaires ont passé la surmultipliée et les speedomètres se sont affolés. En trois heures et demi (entre les pointages de 11h30 et de 15h00), les marins ont parcouru 55,5 milles, une moyenne qui frise l’excès de vitesse sur ces petits monotypes de 10 mètres.

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Il faut dire qu’au petit matin, les grands spinnakers sont sortis de leur baille avant de céder rapidement leur place au spi lourd, puis au solent, pour certains. La plupart des bateaux ayant répondu à la vacation de 14h00 étaient dans cette configuration (grand-voile haute et solent) et avaient calmé le jeu, contraints et forcés, avant de décrocher le combiné de leur VHF. C’était le cas de Corentin Douguet (E.Leclerc/Bouygues Telecom), pointé 11e, à 7,8 milles des leaders : « j’ai fait des surfs à plus de 20 nœuds et deux enfournements jusqu’au mât avec 2 départs au lof derrière. J’ai pas attendu le troisième ! Donc le spi est rentré dans son sac. »

Au même moment, Gildas Mahé (Le Comptoir Immobilier), venait juste d’exploser son grand spi en « 10 morceaux ». « J’étais à la poursuite de Mich (Desjoyeaux) et Koné (Nicolas Bérenger). Et ce qui devait arriver est arrivé ! Le truc c’est que ça enfourne d’un coup, le bateau a du mal à tenir sur ses rails. Tout à l’heure, je me suis fait pousser sur le côté par une déferlante… La mer est méchante ». Robert Nagy (Théolia) et Bertrand de Broc (Les Mousquetaires) avaient vécu la même mésaventure (spi déchiré) et dans une douzaine d’heures aux Sables, on connaîtra le véritable bilan technique de cette chevauchée démoniaque dans le golfe de Gascogne.

La Marque de Bourgenay supprimée
A 135 milles de l’arrivée, le tableau dépeint par les coureurs n’avait donc rien de ragoûtant. Plus tôt dans la matinée, la Direction de Course a d’ailleurs décidé de supprimer la marque de passage à Bourgenay, pour des raisons de sécurité. « Avec la météo fraîchissant et une ETA dans la nuit, la marque devenait trop exposée près de la côte, avec une haut fond à 3 mètres. Il était important de pas mettre les coureurs dans un piège où le moindre gars victime d’un problème technique aurait été drossé dans les rouleaux… » commentait Jacques Caraës pour expliquer sa décision. Cette dernière ne change rien à la stratégie actuelle (les bateaux sont tous regroupés, légèrement au nord de la route directe, pour anticiper une bascule du vent à droite) et a été saluée unanimement.

Mode régate ou mode survie ?
Et d’ailleurs y a t-il encore une place pour la régate dans ces circonstances ? Pour les plus aguerris, oui. La différence s’opèrera entre ceux qui auront cassé ou pas, entre ceux qui mettront la pédale douce pendant que d’autres continueront à faire avancer leur frêle embarcation dans le mauvais temps. C’était le cas de Nicolas Bérenger, 3e au pointage de 15h00, encore sous grand spi au moment de la vacation. « C’est très humide, je serre les fesses car avec 35 nœuds, il ne faut pas faire d’erreur. Ce matin, j’ai vu 19,85 noeuds affichés sur mes instruments, c’est mon record. Mais c’est plutôt pas mal parce que depuis, je vois un bateau qui grossit devant moi, et dessus, y’a écrit F.O.N.C.I.A … »

Michel Desjoyeaux, muet à la VHF, était certainement dans la même position, à l’attaque derrière le leader du jour, Gérald Veniard (Scutum), pointé en tête depuis 4 heures ce matin. Ces trois là, auxquels il faut ajouter Frédéric Duthil (Distinxion), 4e à 1,6 milles de Veniard, impriment leur rythme au reste de la flotte qui commençait à serrer davantage le vent en milieu d’après-midi. De petits écarts commencent à apparaître : Vincent Biarnes (Côtes d’Armor), 15e et premier bizuth, accuse désormais 10 milles de retard sur les meneurs.

Mais jusqu’à quand pourront-il tenir à cette cadence ? La nuit n’amènera aucun répit aux marins, bien au contraire. Le vent va forcir temporairement avec 40 nœuds établis et des rafales à 50. La mer va se creuser et les vagues atteindre les 5 mètres. Ce ne sera pas une partie de plaisir et probablement plus une régate. Il faudra temporairement oublier les résultats et penser à soi.