24 heures décisives

@ JM Liot

La course reste toujours aussi intense pour les Figariste à moins de 400 miles de l’arrivée. Le suspens reste entier alors que la flotte approche d’une dorsale qui peut redistribuer les cartes. Franchir cette difficulté sans encombre risque d’être d’autant plus déterminant que les dernières prévisions donnent une route quasiment en ligne directe pour rejoindre Horta, une fois de l’autre côté de la dorsale.
Ne pas se louper, car cette fois-ci, il n’y aura peut-être pas de sessions de rattrapage. Après le franchissement de la dorsale, les prévisions météo tablent sur un régime de sud-ouest à sud qui permettrait de rejoindre l’île de Faial sur un seul bord. Cela risque même d’être un peu musclé et tous les solitaires savent que seule la bonne forme physique et la capacité d’être avec la bonne toile pourront faire la différence dans les derniers trois cents milles.
Après six jours de course, les solitaires sont forcément en butte avec quelques petits soucis techniques, le plus souvent sans gravité, mais qui pourraient jouer leur rôle dans le final. Xavier Macaire (Chemins d’Océans), aux prises avec des soucis informatiques ne reçoit plus ses mails et doit composer avec un bulletin succinct émis par SMS. Sophie Faguet (Région Normandie) a quelques soucis d’alternateurs, de même qu’Anthony Marchand (Ovimpex – Secours Populaire) qui, se surcroît a dû bricoler un hale-bas de secours. Mais rien d’irrémédiable pour Anthony qui possède une longue expérience en matière de préparation de bateaux. Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) a dû, quant à lui, monter en tête de mât pour enlever un des brins de laine qui servait à ferler son spi et qui s’était enroulé autour de sa girouette. Privé de navigation sous pilote en mode vent depuis quelques jours, le skipper havrais a trouvé le bon créneau pour se hisser et résoudre le problème. Un battement d’aile de papillon peut avoir des conséquences inattendues.
3 groupes se sont formés : Le groupe emmené par le trio Nicolas Lunven (Generali), Sébastien Simon (Bretagne CMB Performance), Anthony Marchand (Ovimpex – Secours Populaire), rejoint progressivement dans cette option par ceux qui ont tenté sans grand succès la route du nord. Pour ce groupe, le danger pourrait venir des trois hommes du sud, Gildas Morvan (Cercle Vert), Xavier Macaire (Chemins d’Océans) et Corentin Douguet (Sofinther – Un Maillot pour la Vie). Ces trois-là accusaient un léger retard au passage du way-point de Sao Vincente qu’ils ont déjà bien comblé… à suivre donc.

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Trêve de bavardage
Pour l’heure, les solitaires du groupe de tête se montrent peu prolixe : comme au poker, on n’a pas trop envie d’abattre ses cartes trop tôt. Certains sont persuadés de posséder un full aux as, mais qui sait si le camp d’en face ne dispose pas d’un carré. Dans ces conditions, la discrétion est la meilleure des défenses psychologiques.
Derrière le premier peloton, tout le monde n’est pas forcément logé à la même enseigne. Si Martin Le Pape (Bellocq Paysages) a trouvé un deuxième souffle en attaquant toute la nuit dernière et en revenant à un souffle des leaders, d’autres peinent à forcer le rythme. Soit par fatigue, à l’instar d’un Pierre Quiroga (Skipper Espoir CEM) qui reconnaît avoir grillé quelques cartouches dans sa descente le long du Portugal, soit par calcul telle Sophie Faguet (Région Normandie) qui attend de voir la trajectoire de Gaston pour afficher des choix météorologiques tranchés, certains concurrents du deuxième groupe sont ainsi tentés de temporiser, d’autant que la chaleur commence à peser sur les organismes dans la journée. Dans ces conditions, les hommes d’expérience ont de nouveau un petit avantage : apprendre à gérer son sommeil, son alimentation, savoir aller vite dans la durée ne s’improvise pas.

Ils ont dit :
Martin Le Pape (Bellocq Paysages) : “Je peux vous dire que j’ai mis du charbon cette nuit pour rattraper mes petits camarades. Sous spi bien serré, sur la tranche, le bateau ricochait sur l’eau, c’était sportif… une fois n’est pas coutume sur cette Douarnenez Horta Solo. J’avais ma frontale sur la tête, il faisait chaud par nuit noire. J’étais en permanence sur mes polaires de vitesse pour être à 100%. J’envoyais du charbon dans la locomotive, c’était drôle mais pas très reposant. Enfin petite satisfaction ce matin en constatant que j’étais dans les plus rapides de la flotte. Ah les options, pour changer… J’ai l’impression de revivre une Transat. Alors Nord ou Sud ? La dorsale va faire office de juge de paix. En terme de météo, c’est très agréable, il commence à faire chaud. Short T Shirt la nuit. Vous avez compris, on n’est pas les plus malheureux. On a quand même bien de la chance d’être là.”
Charlie DALIN (Skipper Macif 2015) : “Tout va bien ce matin premier septembre, beau lever de soleil au largue sous spi sur une mer bien plus calme que ces derniers jours, petit clapot sur longue houle. Les nuits sans lune nous offrent des beaux ciels étoilés. Il fait très chaud ce midi! On ne doit pas être loin du zenith et ça tape.”

Théo Moussion (#Théoenfigaro) : ” Hier était une bonne journée, pas de casse et une bonne trajectoire m’ont amené à passer le point C (second point de passage obligé pour eviter gaston ). Cette nuit j’ai été cueilli à froid par je ne sais quoi, j’ai passé presque la nuit entière dans un vent entre 27 et 30 noeuds alors que les previsions donnaient 17 noeuds. Bref une nuit tres inconfortable, mais qui m’a permis d’avancer tout de même vers la porte 2. Cette porte est dans le sud de Santa Maria … Belle destination mais qui est encore a 444 miles ! Puis ce sera route directe vers Horta ! Hâte d’y être ! Autre nouveauté : aujourd’hui il a fait jusqu’à 30° dans le bateau quand je mettais en charge les batteries. Il faut s’hydrater qu’ils disent alors je le fais. Je grignote un peu dans mes réserves … le saucisson Henaff d’hier a été un pur délice. Aujourd’hui, c’était maquereaux à la moutarde, ça change des lyophilisés … Je teste le pain de mer de la boulangerie de Tréboul qui est fantastique avec les maquereaux… slurp !”

Classement à 17h (TU+2)
1 Nicolas Lunven (Generali) à 511 milles de l’arrivée
2 Sébastien Simon (Bretagne CMB Performance) à 1 mille
3 Anthony Marchand (Ovimpex – Secours Populaire) à 2 milles
4 Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) à 2 milles
5 Xavier Macaire (Chemins d’Océans) à 10 milles