La brise risque fort d’être aux abonnés absents ou extrêmement faible et très irrégulière et même si les courants de marée seront faibles, les passages obligés le long de la côte Sud britannique et de la côte Nord bretonne, rendront les trajectoires très tendues avec peu d’opportunités tactiques. L’endurance va être le facteur clé de cette première étape puisque les routages actuels donnent jusqu’à quatre jours pour grignoter les 484 milles entre Deauville et Plymouth !
Déjà un paramètre à prendre en compte sur cette épreuve atypique en solitaire et en quatre manches, c’est qu’un écart important dès le premier quart temps peut être rédhibitoire : plus d’une heure de delta vis à vis du leader plombe en général le classement final, parce qu’il est très difficile psychologiquement de se « remettre » en phase quand la victoire s’éloigne de l’horizon. En fait sur les 44 précédentes « Solitaire », 18 vainqueurs au classement général ont remporté la première étape et sur ces 18 skippers, sept d’entre eux n’ont gagné que la première étape ! Ainsi à 40,9 %, le vainqueur de cette première manche est victorieux au final… Pour cette 45ème édition, ce parcours est en sus très complexe par rapport aux « habitudes » qui emmenaient les solitaires en Irlande ou en Espagne.
Cette fois, c’est un tracé très côtier en quatre tronçons de respectivement 80 milles pour aller virer Owers (Est de l’île de Wight), 200 milles pour atteindre le phare de Wolf Rock (devant les Scilly), 100 milles pour descendre sur Astan (devant Roscoff) et 100 milles pour franchir le brise-lames de Plymouth. Quelle que soit la direction du vent au départ (du secteur Nord-Nord Est huit nœuds est annoncé à ce jour), il faudra tirer des bords contre le vent, envoyer le spinnaker, enchaîner les empannages, tenir le rythme au vent de travers… Et avec un système orageux prévu, il faudra s’attendre aussi à alterner calmes et grains, soleil et pluie, rotations brusques, brise thermique, regroupements et échappées, redistribution des cartes et jours sans fin puisque les nuits ne durent à l’orée de ce nouvel été, que cinq heures…
Ils ont dit…
Jean-Paul Mouren (Groupe SNEF) : « La première étape, c’est un peu comme quand on va plancher sur un examen et qu’on reçoit le sujet. Il faut rendre la meilleure copie possible. Elle est très importante parce qu’elle détermine tout de suite le niveau du gars. Ce n’est pas une course de hasard ici, les meilleurs élèves, ceux qui ont le meilleur carnet scolaire arrivent souvent devant… »
Alain Gautier (Generali) : « Est ce qu’elle est plus importante que les autres ? Je n’en suis pas sûr… Mais c’est vrai que sur la première étape, il faut éviter de se prendre un caramel parce qu’après, c’est rédhibitoire. Il faut peut-être moins prendre de risques, essayer d’être plus conservateur. J’en ai fait quinze de premières étapes, donc j’ai des histoires en stock ! »
Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la mer) : « Une première étape, c’est primordial. Elle lance l’épreuve : on n’a pas le droit de faire une mauvaise étape. Il faut tout de suite marquer le coup, voir où en est. Pour le moral, c’est bien d‘être devant. Même si au total il y en a quatre, c’est toujours mieux d’avoir de l’avance sur la première étape. Par expérience, le vainqueur du Figaro est souvent dans les cinq premiers dès la première étape. Si à l’issu de la première étape, on est dans le bon paquet, on navigue plus sereinement par la suite. »
Anthony Marchand (Ovimpex-Secours Populaire) : « C’est la première régate de la saison où on navigue à près de 40 bateaux. Cela permet de jauger les différences de niveaux entre les concurrents. La manière de naviguer est très différente sur La Solitaire. Tu découvres ton niveau personnel… Mais ce n’est qu’une seule étape, donc il ne faut trop se mettre de pression en plus : il y en quatre… »