Une étape de petit temps avec trois embûches

Pontons Plymouth
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Le beau temps va perdurer au moins jusqu’au départ de la deuxième étape à 19h30 (heure française) demain soir devant Plymouth et l’installation d’un front occlus sur le centre de l’Angleterre ne devrait pas perturber les premiers milles vers la pointe extrême de Land’s End. Dans un flux de secteur Nord à Nord-Est d’une dizaine de nœuds, les 38 solitaires auront d’abord à boucler un parcours préliminaire dans le Sound, pour aller virer le brise-lames de Plymouth avant de prendre le large, cap à l’Ouest vers le cap Lizard…

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Avec l’intense trafic maritime entre la pointe extrême de la Cornouaille britannique (Land’s End) et l’archipel des Scilly, les zones interdites (DST) aux solitaires sont au nombre de quatre : une trajectoire permet de longer la côte pour se décaler plus au Nord avant d’aborder le grand bord de vent de travers en direction du Fastnet, le chemin le plus court fait passer à raser les îles, un troisième les déborde par le Sud et le quatrième fait un détour méridional qui peut être intéressant si le vent a une composante Est… Il y aura donc déjà plusieurs approches pour entamer ce long bord de vent de travers (175 milles) jusqu’en Irlande. Mais si le vent annoncé sur cette bordure orientale d’un anticyclone centré sur l’île devrait être de secteur Nord-Est, quelques degrés d’angle en plus ou en moins change le choix des voiles. Un quinzaine de nœuds plutôt Nord impose le génois, la même force de vent plus Est envoie le spinnaker. En fait, il est fort probable que le flux ne soit pas si régulier que cela et les changements de voile pourraient se multiplier jusqu’aux abords du Fastnet où la brise va s’écrouler progressivement.

L’atterrissage sur le DST avant le phare irlandais isolé en mer va être crucial en arrivant plus ou moins par le Sud ou par l’Est : quelques petits milles d’écart latéral peuvent se transformer en plusieurs dizaines de minutes de delta pour enrouler le Fastnet, un peu comme lors de l’arrivée d’Alexis Loison (Groupe Fiva) à Plymouth… Sortir au plus tôt de cette zone de molles va permettre d’accélérer en retrouvant le flux plus soutenu de la mer Celtique : il peut se créer des échappées. Et de nouveau, un grand bord travers au vent de Nord-Est d’une quinzaine de nœuds qui lui aussi, peut s’avaler rapidement sous génois ou sous spi avec, là encore des changements de voile au programme. 

Deuxième incertitude

La descente vers la Manche devrait donc être véloce mais une incertitude plane sur le passage aux Scilly : pour imaginer traverser l’archipel, il faut que plusieurs paramètres se conjuguent avec le courant de marée, la force du vent et la direction de la brise, sans compter le contrôle de ses concurrents les plus directs ! Les prévisions météo deviennent moins fiables au fil des jours, mais la tendance est à une rotation de la brise au secteur Est en Manche : les 110 milles qui resteront à parcourir peuvent donc s’effectuer en tirant des bords et là encore, c’est l’heure de la marée qui va déterminer s’il vaut mieux aller à la côte (courant montant) ou rester au large (courant descendant). 

Car avec la pleine lune qui a régné vendredi soir, les forts coefficients de marée atteignent 100 samedi, avec une pleine mer à 19h45 à Plymouth. Les pleines mers aux Scilly auront lieu à 6h55 et à 19h20 dimanche avec 99 de coefficient, et à 7h45 et 20h10 lundi avec 95 de coefficient. Mardi à Roscoff, la pleine mer est à 10h02 et la basse mer à 16h27 avec 92 de coefficient de marée… Il y aura du jus dans les chenaux !

Yann Eliès sera au départ de cette deuxième étape

Ils ont dit…

Alain Gautier (Generali) 20ème  de la première étape : « On devrait partir en baie de Plymouth avec une dizaine de nœuds de Nord-Est : nous allons envoyer le spinnaker dès que le parcours préliminaire dans le Sound sera bouclé. La première difficulté, c’est de choisir comment passer les zones de trafic maritime interdites (DST) qui sont quatre au niveau des Scilly : il faudra faire son choix quasiment au passage du cap Lizard ! »

Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012) 2ème  de la première étape : « Un départ un peu mou, du vent plus fort pour aller aux Scilly, puis un régime qui s’essouffle en arrivant sur le Fastnet. On peut avoir du vent très faible en Irlande et avec de la mer, a contrario de l’île de Wight lors de la première étape : cinq nœuds de vent sur mer plate, on avance encore ; cinq nœuds de vent avec de la houle, on peine ! On retrouvera du vent après le phare irlandais jusqu’à la pointe anglaise : il faut être devant… Il va se passer des choses parce qu’il faudra peut-être alterner génois, spi de tête dans la molle, spi capelage serré dans le médium. Il y aura des choix de voile à faire et des réglages du gréement aussi ! » 

Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la Mer) 5e de la première étape : « Ce sera compliqué sur le départ, parce qu’il y aura pas mal de courant. Il y aura des pointes à passer comme le cap Lizard, et puis Wolf Rock, et aussi les DST (Dispositifs de Séparation de Trafic) à éviter. On peut avoir du vent faible à l’approche de l’Irlande, ce qui peut corser et allonger la durée du parcours. Le contournement du Fastnet se fera dans la pétole. Sur les deux traversées, il y aura suffisamment de vent pour avancer au vent de travers. L’arrivée aussi pourra présenter des difficultés. Ce sera surtout une étape de petit temps. Cela creusera probablement les écarts. »

Alexis Loison (Groupe Fiva) 1er de la première étape : « Ce ne sera pas si simple que ça. L’étape risque d’être très variée et très sympa. Ce sera du spi au début avec pas mal de vent pour rejoindre la pointe anglaise, et puis du reaching pour aller jusqu’au Fastnet, où l’approche sera déterminante parce qu’il n’y aura pas beaucoup de vent et l’île est imposante. Le vent risque d’être dévié, il faudra soigner cette approche. Ensuite, pour rejoindre Roscoff, il n’y aura pas beaucoup de vent et il pourra y avoir un gros regroupement de la flotte. Il va forcément se passer des choses. »