Treize changements de leader en trois jours

La flotte à Plymouth
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484 milles en Manche dans du vent variant de 2 à 30 nœuds, des bascules au Nord-Est, puis à l’Est puis au Sud, et enfin au Sud-Ouest, une mer plate comme un lac devant l’île de Wight et des creux de deux mètres et plus en passant Wolf Rock : cette première étape a offert un panel complet de conditions, mais surtout multiplié les phases de transitions entre systèmes météo, entraînant plusieurs rebondissements spectaculaires. A l’image du coup de Trafalgar au pied de Sainte-Catherine quand les leaders et les trois quarts du peloton cherchaient à se protéger du courant contraire dans une brise quasi fantomatique : les trois derniers solitaires touchaient alors un vent venu de l’Est et pouvaient piquer au large pour éviter ce piège de l’île de Wight ! 

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En fait entre Deauville et Plymouth, ils furent onze solitaires à se succéder en tête de la flotte avec treize changements de leader en trois jours ! Anthony Marchand (Ovimex-Secours Populaire) prenait ainsi le meilleur à la bouée de dégagement du parcours préliminaire dans une brise d’une dizaine de nœuds de Nord-Est, et laissait quelques heures le commandement à Erwan Tabarly (Armor Lux-Comptoir de la Mer) avant de le reprendre lors de cette première traversée de la Manche, direction la bouée « Owers ».  Une petite bascule au Nord juste avant la marque donnait l’avantage à ceux qui avaient glissé un peu plus dans l’Est : Adrien Hardy (Agir Recouvrement) s’emparait du flambeau et creusait l’écart quand la brise de secteur Est se mit à mollir face au courant de marée montante : Nick Cherry (Redshift) prenait momentanément la première place au classement grâce à son option encore plus près des côtes anglaises.

Mais c’est au matin du lundi que le plus gros coup de Jarnac eut lieu : pointé dans le groupe de queue, Joan Ahrweiller (Région Basse Normandie) arrivait à glisser dans une brise revenue par derrière et à contourner toute la flotte. En compagnie de Nicolas Jossier (In Extenso-Experts comptables), qui donnait alors le tempo dans une brise revenue au secteur Sud faible à modérée. Il tenait la corde jusqu’à Portland Bill mais se faisait ensuite débordé en vitesse pure par Alexis Loison. Et quand il fallut virer de bord au passage d’un front à grains, le Cherbourgeois fut le dernier à faire la manœuvre : il conservait le leadership jusqu’à la longitude de Plymouth où l’impressionnant Yann Eliès avalait le groupe de tête. 

Le dématage du Figaro de Yann Eliès vu par Charlie Dalin

Un vainqueur sur le fil

Dans une brise qui montait alors à plus de 20 nœuds avec rafales jusqu’à 30 nœuds et une mer très chaotique et agitée, le leader donnait le tempo jusqu’à ce que son mât s’écroule juste après le virement de bord au ras du phare de Wolf Rock ! Charlie Dalin (Normandy Elite Team) en profitait pour un long bord de 100 milles de vent de travers musclé : il virait encore en tête la bouée d’Astan devant l’île de Batz mais, au milieu de la Manche, se faisait dépasser par Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012) plus rapide sous spinnaker dans une brise très modérée d’Ouest-Sud Ouest. 

En choisissant de se décaler plus dans l’Est, Alexis Loison reprenait la main sur les derniers milles pour coiffer sous spinnaker serré, son concurrent sur la ligne avec 7’27 d’avance sur son dauphin… Mais à Plymouth, les écarts entre les douze premiers restaient inférieurs à une heure tandis que Sam Matson (Artemis 21) s’adjugeait la première place chez les « bizuths ». Avec une deuxième étape entre Plymouth et Roscoff (via le Fastnet) qui s’annonce piégeuse avec des calmes au pied du phare irlandais et une brise contraire, variable et faible pour le retour en Manche, il y a encore du jeu !