Sensations garanties pour la dernière étape

brit air 2006
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Figures libres en perspective
C’est la dernière. Ultime occasion de briller pour les déçus de cette Solitaire Afflelou Le Figaro, ceux dont les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances. Ils n’ont plus grand chose à perdre, pas d’autres choix que d’attaquer. Ils vont en avoir l’occasion. Le menu météorologique pour les 24 premières heures de course est épicé et va leur permettre d’exprimer leur habileté de descendeurs, au moins pendant les premiers 250 milles de course. Ce sera du spi, au largue puis au vent arrière, avec 20 à 25 d’ouest-nord-ouest dans une houle de 2 à 3 mètres. Sensations garanties à chaque empannage, susceptible de se transformer en figure libre. Concentration nécessaire pour cette partie de tactique au portant. Heures de barre obligatoires pour maintenir la cadence et l’équilibre du bateau. Heures de sommeil en souffrance, et l’avarie, le problème technique, à éviter à tout prix. Le risque de déchirer son grand spi et la perspective démoralisante de finir avec le lourd dans les petits airs prévus à l’approche des côtes françaises font partie du jeu.
 
Attaquer pour espérer briller
Les 24 premières heures de course seront donc rapides (autour de 10 nœuds de moyenne) et délicates, avec deux passages un peu chauds au Fastnet et aux Scilly – à laisser à tribord- dans une mer probablement difficile. Les fanas de la brise et les marins les plus expérimentés feront certainement la différence en conduite et en résistance. «Yann Eliès, Armel Le Cléac’h, Gildas Morvan, Eric Drouglazet sont plutôt bons dans ces conditions » admet Charles Caudrelier (Bostik), pas mécontent non plus du programme. Charles fait partie de ceux qui, selon ses propres termes, sont « libérés » pour tenter quelque chose. « Un homme qui n’a rien à perdre est toujours un homme dangereux » devise Corentin Douguet (E.Leclerc-Bouygues Telecom) qui s’inclue au passage dans cette catégorie. « Je suis 31e à 3 heures du premier bizuth, je vais tout faire pour briller sans cette étape. »
Ils sont nombreux à prétendre à cet ultime accessit avant que le rideau ne tombe sur cette 37e édition.
 
Conserver sa place sur le podium
Les écarts vertigineux de la 2e étape ont pratiquement fermé l’accès au podium du classement général. Ses actuels occupants, dans l’ordre Nicolas Troussel (Financo), Thierry Chabagny (Littoral) et Armel Le Cléac’h (Brit Air) feront tout pour y rester, avec en fond des risques et des enjeux différents pour chacun d’eux.
Pour Thierry Chabagny, Nicolas Troussel est l’homme à battre et pour Nicolas Troussel, Thierry Chabagny est l’homme à surveiller. Les deux adversaires et amis sont à 1h31 l’un de l’autre. Le skipper de Financo annonce la couleur : « Les concurrents, je ne m’en préoccupe pas. Le seul que je vais surveiller, c’est Thierry Chabagny. Ce sera du marquage, quand Thierry sera quelque part, je ne serais pas loin, du moins j’espère. » Son rival affichait davantage de décontraction : « Le classement général, je verrais ça dans le chenal de Concarneau… enfin c’est peut-être plus facile à dire qu’à faire » Quant à la troisième place d’Armel Le Cléac’h, elle est convoitée par au moins deux concurrents dont le retard est d’environ 1 heure. Le vainqueur de l’édition 2003 devra surveiller dans son rétroviseur.
Gérald Veniard (Scutum) en pleine spirale vertueuse et Yann Eliès (Groupe Generali assurances) qui a faim de résultat pour sa dernière apparition dans La Solitaire avant longtemps.
 
Ouessant : une occasion de bouleverser la donne ?
Les opportunités de creuser des écarts ne seront pas légion dans cette étape, mais elles existent bien,  notamment à l’approche des côtes françaises. C’est la deuxième grande phase de la course et peut-être le tournant de cette quatrième étape. Après avoir avalé les milles au portant vendredi et samedi, les 44 concurrents, qui devraient se trouver à proximité de la bouée Racon Ouessant dimanche au petit matin, vont alors buter dans une zone de transition constituée de vent faible et variable.
Ils continueront à plonger vers le sud avant de faire le tour de l’île de Groix (à laisser à bâbord) pour un finish probable au louvoyage avec toutes les difficultés inhérentes à la navigation côtière. Cette dernière portion de 120 milles (entre Ouessant et Concarneau) pourrait donc réserver quelques surprises.
Les marins ont eu droit à quatre jours de récupération à Dingle pour se préparer à ce dernier affrontement.
 
Les échos des pontons
 
Nicolas Troussel (Financo, 1er) : « je vais rester proche de Thierry Chabagny »
« J’ai hâte de partir et envie d’arriver le plus vite possible. Je vais essayer de rester assez proche de Thierry (Chabagny), de ne pas créer de décalage. Je ne vais pas jouer pas la victoire d’étape. Comme les conditions seront sportives, on essaye de bien préparer le bateau, vérifier la visserie, le mât, les aériens… Il y aura des manœuvres à faire sous spi et il faudra éviter de se mettre en vrac. Ca va aller vite, on n’aura pas trop le temps de réfléchir, on sera au taquet, beaucoup à la barre.»
 
Thierry Chabagny (Littoral, 2e) : « tenter de faire abstraction du général »
« Sur cette 4e étape, il va falloir faire preuve de lucidité. On part dans du vent soutenu et portant au moins jusqu’aux Scilly et je doute qu’il puisse y avoir de gros écarts sur cette première partie du parcours. En revanche, ça peut mollir dès Ouessant et la remontée après Groix peut être bien plus tendue aussi. Il faudra aller vite. En ce qui me concerne, je vais m’efforcer de faire la meilleure course possible, en faisant abstraction du classement général. Je ne vais pas chercher à marquer Armel (Le Cléac’h) ou à attaquer Nico (Troussel) comme un fou… et que toute la flotte en profite pour passer. »
 
Gérald Veniard (Scutum, 4e) : « finir proprement »
« Je ne me projette pas sur le podium. Je veux finir la course proprement mon objectif est toujours le même : finir dans les 10 premiers. J’ai un peu d’appréhension car sur cette étape, il va y avoir du vent très fort, on n’est pas à l’abri de casser quelque chose, donc je ne veux pas prendre de risques inconsidérés. Le truc qui m’inquiète c’est un passage de front qui peut créer des écarts énormes, comme l’an dernier à l’occidentale de Sein, où en l’espace d’une nuit, certains ont pris 30 milles.
On sait qu’il faut être dans le coup d’entrée de jeu pour ne pas risquer ce phénomène d’accordéon… mais en même temps je ne vais pas attaquer comme un fou au risque de me faire mal et de faire mal au bateau. Je vais rester conservateur, je ne vais pas changer ma façon de faire. »
 
Charles Caudrelier (Bostik, 7e) : « Je suis un peu déçu de mon Figaro, j’ai envie de me racheter, de gagner cette étape, c’est important pour le moral. Je n’ai pas grand chose à perdre au classement général.  Les gens vont attaquer, porter le spi haut. Le tout sera de ne pas éclater le grand spi. Certains coureurs sont bons dans ces conditions : Yann Eliès, Armel Le Cléac’h, Gildas Morvan, Eric Drouglazet… De mon côté, j’aime bien ces situations et je suis libéré pour attaquer. »
 
Jeanne Grégoire (Banque Populaire, 12e) : « les compteurs sont remis à zéro »
« Je me dis que chaque étape succède à une autre. Les compteurs sont remis à zéro et c’est pareil pour moi. Ca va être assez musclé au portant, mais ce qui est bien c’est qu’on rentre à la maison. J’ai appris des choses sur l’étape précédente. Je ne suis pas assez bonne en marquage des adversaires à 80 milles de l’arrivée. Donc, il ne faut pas que je perde ma lucidité sur la fin. Mon rêve serait d’arriver à Concarneau un après-midi avec du thermique pour pouvoir rentrer sous spi dans le chenal avec le public et mes amis autour… mais ce ne sera peut-être pas le cas ! »

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Source: La Solitaire Afflelou Le Figaro