La première nuit de course a mis les marins à l’épreuve. Le coup de vent associé au passage du front froid a été rude (rafales à 40 nœuds) et c’est dans une mer abrupte que les équipages ont commencé leur traversée du golfe de Gascogne. Premières victimes du mauvais temps : les détenteurs du titre et grands favoris Gildas Morvan et Charlie Dalin, dont le bateau Cercle Vert a démâté ce matin vers 3 heures. Les deux hommes n’ont pas été blessés, mais leur déception est grande. Ils ont fait route au moteur et sont arrivés à Port La Forêt cet après midi.
Pour les autres, il a fallu vaincre le mal de mer, se déplacer en rampant et se cramponner pour éviter de valdinguer dans l’habitacle ou sur le pont du bateau. A bord de Guadeloupe Grand Large 2, Nicolas Thomas faisait part à la direction de course de quelques bobos : girouette arrachée et antenne VHF branlante. Sur Lorientreprendre, c’est le solent qui s’est déralingué, obligeant Yannig Livory et Guillaume Farsy à gréer leur tourmentin. Heureusement, cette entame un peu violente a été de courte durée. Ce matin vers 11h30, les 14 équipages ont viré les uns après les autres derrière le front puis choqué les écoutes dans le nouveau vent d’ouest d’une vingtaine de nœuds. La progression est désormais plus confortable, si ce n’est les vagues, qui viennent toujours frapper l’étrave de face.
Hier, chacun s’était placé sur l’échiquier (sur un axe nord-ouest /sud-est d’une vingtaine de milles) pour aborder ce premier rendez-vous stratégique de la course. Et ce sont les hommes du centre qui s’en tirent le mieux après le front. A la mi-journée, Gwenolé Gahinet, dont c’est la première Transat AG2R et Paul Meilhat (Safran-Guy Cotten) prenaient un petit avantage en tête devant Nicolas Lunven et Eric Peron (Generali). La flotte est encore relativement groupée (5 milles entre le premier et le sixième) et les bateaux ont tendance à s’aligner les uns derrière les autres. Leur objectif : gagner le plus rapidement possible dans le sud pour échapper aux mailles de l’anticyclone.
La menace anticyclonique
Ce dernier est en train de gonfler vers le nord et de prendre ses aises dans le golfe de Gascogne. La flotte navigue actuellement à sa lisière mais des ralentissements sont possibles avant un nouveau renforcement du vent de nord-est, très net, aux abords du cap Finisterre dans la journée de mardi.
Ils ont dit
Erwan Tabarly, Gedimat : “On a eu du vent cette nuit, des rafales à 40 nœuds sous le front. On est au débridé en route directe vers le cap Finisterre, en tribord amures avec une mer de face, ce n’est pas très agréable mais plus maniable que tout à l’heure. Il faut s’accrocher à chaque vague, car on avance d’un mètre dans le creux d’une vague. On est un peu plus sud car on a viré assez tôt. L’idée est d’aller gagner le flux rapidement pour avoir plus de vent au cap Finisterre.”
Yoann Richomme, Skipper Macif : “Le vent est monté progressivement, mais la mer était déjà très formée. Nous avons été malades chacun notre tour ! On a changé la voile d’avant au bon moment, et on s’est mis dans le rythme de la course. Nous avons vraiment eu des conditions très violentes. Le bateau faisait des bonds dans les vagues. Pendant une heure, le vent soufflait à 35 nœuds établis. Nous n’avons pas réduit la voilure, et c’est bien passé comme ça pour nous.”
Laurent Pellecuer, 30 Corsaires : « Nous avons eu jusqu’à 35 nœuds cette nuit. Nous avons fait un changement de voile dans la nuit noire. C’était très difficile. C’était à la limite du dangereux pour l’équipier. La mer est très hachée avec une grosse houle, très abrupte. Le bateau décolle de temps en temps. Ça a fait tomber Alexia sur la barre et on a failli virer à contre. Nous étions un peu secoués, mais nous nous sommes rapidement amarinés. »
Thierry Chabagny, Gédimat : « Les conditions météo depuis hier sont toujours assez fortes. La mer est vraiment défoncée, mais c’est pas le pire qu’on ait eu. Cette nuit, c’était pire. On se relaie depuis hier soir pendant 1h30-2h parce que dehors, on s’en prend plein la figure, et ça fait du bien de se reposer même si tu ne te peux pas vraiment car il y a du vacarme à l’intérieur. Là, nous sortons en rampant pour aller barrer. Nous sommes habillés en bottes, ciré cagoule, et on s’attache, car à la barre, ça donne des bons coups de butoir. Il faut faire gaffe. »
Classement de 16h
1 SAFRAN – GUY COTTEN Gwenolé Gahinet / Paul Meilhat à 3687,1 milles de l’arrivée
2 GENERALI Nicolas Lunven / Eric Peron ) 1,27 mille
3 GEDIMAT Thierry Chabagny / Erwan Tabarly à 3,48 milles
4 INTERFACE CONCEPT Jean Le Cam / Gildas Mahé à 4,1 milles
5 SKIPPER MACIF Fabien Delahaye / Yoann Richomme à 4,13 milles