Quinze ans après la première tentative victorieuse de Bruno Peyron sur Commodore Explorer, parti en éclaireur sur les traces de Phileas Fogg et de Jean Passepartout (« Le tour du monde en quatre-vingt jours » de Jules Verne), Franck Cammas et son équipage vont tenter de parcourir la circonférence de la terre (26 100 milles) par les trois caps en moins de cinquante jours. Atlantique, Indien, Pacifique et Atlantique de nouveau, le trajet représente en réalité sur l’eau une distance comprise entre 25 000 et 27 000 milles en raison des aléas météorologiques et de la présence de glaces au Nord de l’Antarctique. C’est donc une vitesse moyenne de plus de 23 nœuds que vise Groupama 3, soit plus de 550 milles par jour pendant plus d’un mois et demi !
Un mois de moins en douze ans !
En 1993, Bruno Peyron et ses quatre équipiers étaient tout juste passés sous la barre des quatre-vingt jours (79j 06h 16′), puis Peter Blake (Enza) en 1994, Olivier de Kersauson (Sport Elec) en 1997, Bruno Peyron (Orange) en 2002, Steve Fossett (PlayStation) en 2004 avaient descendu le temps de référence jusqu’à la tentative réussie de Bruno Peyron (Orange II) en 2005. Près de vingt-neuf jours de moins depuis sa première expérience…
Au tour de Groupama 3 de se mesurer au sablier du temps avec cette fenêtre météorologique du jeudi 24 janvier au matin qui s’annonce très favorable, du moins pour les premiers mille milles du parcours : « l’objectif était de trouver une prévision météo qui nous permette d’arriver à l’équateur en six jours. Nous n’avons pas pu prendre celle de mi-décembre en raison de problèmes de foils et au regard du parcours de Thomas Coville qui était parti avec, elle n’était pas si favorable que cela dans l’hémisphère Sud. Cette nouvelle opportunité se présente bien, même si c’est compliqué au niveau des Canaries. Il y a une zone de petit temps qu’il est encore difficile d’appréhender précisément. Nous serons ralentis mais les temps théoriques tournent toujours autour de six jours pour l’équateur et de toutes façons, nous ne pouvons plus trop être exigeants parce que notre stand-by touche à sa fin… Nous nous élancerons devant Ouessant entre 6h00 et 10h00 TU demain jeudi. La fenêtre météo est courte et il ne faudra pas traîner en bordure d’un anticyclone dans le golfe de Gascogne… » indiquait Franck Cammas avant le départ de Lorient.
Ce n’est qu’un au revoir…
C’est donc à 17h00 précises que Groupama 3 quittait le ponton de la base sous-marine de Lorient, direction Ouessant dans une faible brise de secteur Sud-Ouest, tournant à l’Ouest cette nuit avant l’arrivée d’un front prévu pour jeudi matin. Une bonne situation pour longer les côtes finistériennes et se caler en attente à l’entrée de la Manche avant le départ jeudi matin devant le phare du Créac’h. Une heure qui sera affinée cette nuit et au petit matin avec Sylvain Mondon de Météo France, afin de prendre le meilleur créneau pour traverser le golfe de Gascogne. L’enchaînement doit en effet être optimal pour bénéficier d’un flux portant jusqu’au cap Finisterre. Mais aussi pour négocier la bulle de vents faibles au large des Canaries et attraper une dépression argentine dans l’hémisphère Sud. Une perturbation qui permettrait à Groupama 3 de se présenter très favorablement au cap de Bonne Espérance.
Mais avant d’entamer les surfs endiablés sur la longue houle de l’océan Indien, c’est avec une émotion contenue que les dix hommes d’équipage ont salué leurs femmes, leurs enfants, leurs familles, leurs amis, leurs proches, les préparateurs du maxi trimaran, les Lorientais… venus lancer un « au revoir » discret mais intense.



















