Antoine Koch toujours aux commandes à moins de 20 milles du finish

Antoine Koch (Sopra) - Solitaire du Figaro
DR

Voilà plus de trois jours et trois nuits qu’ils remontent vers le nord-ouest pour rallier Dingle, terme de cette 3e étape. Trois jours intenses où se sont succédés stratégie entre les îles bretonnes, recherche de vitesse sur de lancinants bord de près, passage de dorsale anticyclonique, jusqu’au coup de Trafalgar cette nuit en mer Celtique, aux abords d’un centre dépressionnaire. Cette étape, qui devrait s’achever vers 20h00 pour les premiers, a donc été aussi longue que riche comme en témoignent notamment les nombreux changements de leaders. Ils sont sept en effet à avoir vu leur nom inscrit sur la première ligne du tableau de classement.

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Sept leaders différents en trois jours

Il y eut d’abord Frédéric Duthil (Bbox Bouygues Telecom), en tête à la bouée Radio France quelques poignées de minutes après coup d’envoi à Saint Gilles Croix de Vie. Puis ce fut le tour de Gérald Veniard (Macif) de s’illustrer à la bouée de La Sablaire à quelques dizaines de mètres des plages de l’île d’Yeu. Le 11 août, au terme d’une première nuit de slalom entre les îles (Belle Ile, les Glénan) Michel Desjoyeaux prend les rênes et enroule en tête cap Caval (Grand Prix GMF Assistance), devant la pointe de Penmarc’h, dernière marque de ce parcours de 485 milles. Jusqu’au 12 août au matin, après le franchissement de la dorsale anticyclonique qui verra les solitaires entamer un long bord de près bâbord, le skipper de Foncia s’échange la vedette avec Charles Caudrelier Benac (Bostik). Mais au moment d’entrer dans les eaux anglaises de la Manche, Armel Tripon (Gedimat) prend le relais, avant de céder sa place en fin de journée à Antoine Koch. Armel Le Cléac’h (Brit Air) ne le remplacera que le temps d’un classement ce matin. A la barre de Sopra Group, le marin de Fouesnant ouvre toujours la route à 1,3 milles de Le Cléac’h et 3 milles de Duthil. Suivent dans l’ordre Gildas Mahé (Banque Populaire), le leader du classement général Nicolas Lunven (CGPI), au coude à coude avec Yann Eliès (Generali).

La flottille qui progresse sous spi sur une mer lisse, a tendance à s’aligner entre Bolus Head et les îles de Skellig… Il reste encore 27 milles – soit moins de 5 heures – avant de savoir si le bateau à la robe rouge sera le premier à déflorer la ligne sous les vertes collines. S’il est très bien placé pour l’emporter, le jeune Antoine doit se méfier car il a à ses trousses quelques fins limiers expérimentés et coutumiers des victoires…
C.El

Les echos du large :

Thierry Chabagny (Suzuki Automobiles, 10e au pointage de 17h30) :« Il s’est passé plein de trucs inattendus, la dernière nuit on a eu quasiment 180 degrés de rotation de vent, ce qui n’était pas trop prévu ! Pas terrible pour moi : ils annonçaient du nord-ouest, ce que j’avais anticipé, mais depuis ça a quasiment fait le tour du cadran et ça a permis à toute la flotte dessous dans l’est de se refaire et passer devant ! Je me dis qu’il faut amener le bateau jusqu’à Dingle et qu’il peut se passer encore des choses. Il ne faut rien lâcher jusqu’au bout et essayer de comprendre. Mais ce n’est pas simple.»

Antoine Koch (Sopra Group, 1er) : « Je vois les côtes et la brume aussi mais je ne vois pas tous les bateaux. Cette nuit a été assez compliquée, j’ai l’impression d’être pas mal placé. En ce moment on n’a pas les conditions qu’on attendait, je suis dans 12 noeuds de vent d’est-sud-est mais on attend encore une transition avec du vent de sud-ouest, donc c’est vraiment loin d’être terminé ! Etre aux avant-postes m’arrive à chaque fois qu’on va en Irlande. J’ai un vieux souvenir d’une victoire d’étape en 2002, mais là il est bien trop tôt pour en parler. Je suis complètement cramé, il est vraiment temps d’arriver. La plus grande des motivations pour avoir la pêche c’est de sentir qu’on est dans le coup… »

Armel Le Cléac’h (Brit Air, 2e) : « La nuit n’a pas été simple avec le passage d’un front et une bascule Est, voire Nord-Est. J’ai réussi à m’en sortir pas trop mal. Pour l’instant il y a du vent, mais la météo annonce des conditions variables et voilà trois ans, on s’était tous arrêtés dans la baie de Dingle. Pour l’instant il y a un peu d’écart mais j’ai peur que ça mollisse par devant et que ça revienne par derrière. Antoine est un peu en ouvreur devant et ça permet de voir si jamais ça mollit et qu’il faut faire un détour. J’ai essayé de faire les choses simplement. La nuit dernière, je me suis un peu échappé du groupe dans lequel j’étais. J’ai du tirer les bons bords un moment ou un autre, mais ce n’est pas facile. Il faut être vigilant jusqu’au bout car les arrivées à Dingle sont toujours un peu compliquées. »

Franck Le Gal (Lenze, 7e) : « Je suis au contact avec quelques bateaux, Gérald Veniard est un peu dessous il y a aussi Nicolas Lunven et Yann Eliès. J’aime bien cet endroit qu’est le Fastnet même si on ne voit pas grand chose. Je serai bien content de finir cette course car je suis un peu épuisé, je n’ai pas dormi cette nuit. A voir les cartes météo je me doutais qu’il y aurait un peu de ‘brasse’ (de bouleversements, ndr) mais sûrement pas à ce point ! »

Nicolas Lunven (CGPI, 5e) : « A droite, j’ai la côte irlandaise sous les nuages et à gauche à trois longueurs j’ai Generali avec Yann Eliès ! J’ai réussi à me reposer en début de nuit, donc ça va. Je ne contrôle pas vraiment car Armel Le Cléac’h a pas mal d’avance, si ça se trouve il sera devant au général. Je suis juste venu me recaler à côté de Yann car je perdais sur lui en étant à terre, mais j’essaie juste de naviguer intelligemment. J’aurais fait la même chose avec un autre concurrent. C’est top, je n’étais pas venu avec des objectifs aussi élevés que ça donc c’est génial, je profite ! Ce serait bien prétentieux de ma part de dire que j’avais prévu la bascule de cette nuit. Mais ce n’était pas franc et les dernières cartes d’analyse nous montraient qu’au lieu d’avoir une petite dépression qui se formait, c’était un anticyclone… Cela renverse forcément la tendance, puisque le vent tourne dans le sens inverse ! »

Thomas Rouxel (Défi Mousquetaires, 11e) : « Je viens de passer la première pointe irlandaise, on navigue au portant plein vent arrière dans 11 noeuds de vent, je dois être entre la 15e et la 20e place. C’est vraiment joli les falaises irlandaises avec un peu de verdure, malheureusement la luminosité n’est pas idéale. C’est le vent qui m’a amené sur cette trajectoire et j’essaie de faire avec. C’est un peu moins humide, on avance, on est au portant, donc le moral est bon même si je ne suis pas très content de ma position car j’avais bien navigué jusque là. Ce n’est pas fini, il peut encore y avoir des changements sur la fin de l’étape. »

Michel Desjoyeaux (Foncia, 12e) : « Pour expliquer ce qui s’est passé, il faudrait que j’aie compris et pour le moment je n’ai pas compris ! J’ai fait une grosse erreur en essayant de protéger l’ouest, du coup je suis à la ramasse. Peut être que les grands périples autour de la planète ne sont pas tout à fait la même chose que la Solitaire du Figaro, qui est vraiment spécifique… et fait un peu mal aux cheveux ! J’ai privilégié les isobares et pas la petite cellule anticyclonique… et voilà. Mais c’est toujours intéressant, on apprend encore. J’ai Fabien Delahaye juste devant moi, Suzuki et Athema un peu plus loin devant. On voit des spis un peu partout, mais je pense que malheureusement il y en a une bonne quinzaine devant. Je n’avais pas trop mal navigué en début de parcours, je ne comprends pas comment Brit Air a pu faire le tour de la paroisse. Hier pas grand monde n’aurait parié sur ceux de droite, mais c’est pourtant eux qui sont sortis ! »

Frédéric Duthil (Bbox Bouygues Telecom, 3e) : « La nuit a été un peu fatidique avec une bonne bascule de vent. Prévue ou pas prévue, ça les uns te diront que oui, d’autres que non… en tous cas moi je ne l’avais pas venu venir ! Il se trouve que je m’en sors bien de mon côté, impeccable, la vie est belle. Ça fait du bien d’être à plat de ne pas avoir le bateau qui tape, la vie à bord est quand même plus simple. Je suis au taquet, j’espère que ça ne va pas partir en eau de boudin comme il y a trois ans, en espérant que le vent tienne. On est plein d’espoir ! C’est un beau Figaro en tous cas, ça va être chouette ! Tout reste possible et imaginable… »