7 janvier 2008 – Jour 58
Après un week-end au ralenti, Paprec-Virbac 2 progresse à 18 noeuds et creuse nettement l’écart avec son rival le plus direct. Néanmoins, les conditions sont très difficiles pour le tandem Dick-Foxall, aux prises avec de violents grains : "on tâche de ne pas prendre trop de risques et de limiter les efforts sur le matériel ", expliquait Jean-Pierre.
Une situation en totale opposition avec celle vécue par Alex Thomson et Andrew Cape, encalminés dans les 50èmes "hurlants" ! "Nous n’avons pas eu un calme aussi plat depuis les Canaries", résumait Alex Thomson.
Entre Temenos II et Mutua Madrileña, la partie est serrée. L’écart, comme l’avait prédit Dominique Wavre ce week-end, est tombé à une centaine de milles.
A bord d’Educacion sin Fronteras, Servane Escoffier, au moment de leur passage dans le détoit de Cook, fait les comptes avec émotion : "Nous sommes lundi, nous entamons notre 9e semaine de mer. Nous avons passé la cinquième porte de parcours. Nous avons vu la terre, première fois depuis le 21 novembre dernier…yoouhouuuu, je commence à comprendre ce que devaient ressentir les flibustiers et autres marins d’il n’y a pas si longtemps. Terre, terre !!! Alors, quelles émotions nous aurons si nous parvenons à finir ce tour du monde, lors de nos retrouvailles avec tout le monde à Barcelone?!! Ce sera magnifique !! Il faut qu’on y arrive rien que pour vivre cela !"
8 janvier 2008 – Jour 59
Dans moins de 48 heures c’est le cap Horn, aussi appelé cap Dur ou cap des tempêtes. Paprec-Virbac 2 avance solidement mais prudemment vers ce goulet sud-américain, synonyme de porte de sortie du Grand Sud, que Damian Foxall avouait quitter avec un sentiment mêlé de nostalgie et de soulagement. « Le Grand Sud, on a l’impression que ça ne finit jamais. C’est juste une étendue vaste et inhabitée, on s’y sent comme un simple visiteur. Ce n’est que de l’eau avec quelques îles isolées. La plupart du temps, ça souffle fort, et quand ce n’est pas le cas, c’est qu’on sort d’un coup de vent ou que l’on va y entrer (.). C’est un endroit fantastique et attirant, mais on est content d’en partir. »
Le dauphin Hugo Boss est relégué à plus de 1000 milles derrière, ralenti par des vents très pacifiques.
Temenos II est depuis plusieurs jours sous la menace directe de Mutua Madrileña : « c’est très motivant d’avoir un adversaire tout proche », avoue Dominique Wavre.
Après être passés au nord des îles Chatham, Servanne Escoffier et Albert Barguès expérimentaient une sorte de « crachin breton » et de vents mous.
9 janvier 2008 – Jour 60
Bientôt la ‘délivrance’ pour Paprec-Virbac 2 qui franchira demain matin (jeudi), par 55 degrés de latitude sud, le légendaire cap Horn. Damian Foxall, pour qui ce sera le septième passage, relatait des conditions de progression relativement faciles et prévoyait de doubler le rocher dans 30 à 35 nouds de vent, avec quelques empannages à la clé.
Cette perspective n’était pas sans donner quelques regrets à Jonathan Mc Kee (co-équipier de Guillermo Altadill à bord d’Estrella Damm, qui a du se retirer de la course à Cape Town le 14 décembre dernier, suite à une série de problèmes techniques) : « Je donnerai cher pour être toujours dans la course » avouait-il, « même si les conditions du Grand Sud sont toujours très dures ».
Alex Thomson, skipper d’Hugo Boss, commence déjà à penser à sa sortie du Pacifique mais voyait mal comment, à court terme, il pourrait revenir sur le bateau de tête. « A moins d’un coup météo ou d’un souci technique à bord de Paprec-Virbac 2, je ne vois pas pour l’instant comment combler l’écart. Jusqu’à présent, ils font une course fabuleuse ».
Comme Temenos II et Mutua Madrileña, Educacion sin Fronteras se prépare à négocier un train de dépressions venu de l’ouest avec de probables épisodes de vents forts ces jours prochains.
10 janvier 2008 – Jour 61
Exit le Pacifique Sud, bonjour l’Atlantique. Ce matin, à 07h20 heure fr ançaise, Jean Pierre Dick et Damian Foxall ont franchi le cap Horn. Depuis le départ de la course le 11 novembre dernier, l’équipage de Paprec-Virbac 2 a toujours été aux avant-postes, se disputant la tête avec PRB jusqu’à ce que ce dernier démâte et se retire le 8 décembre 2007. Dès lors, le tandem franco-irlandais prenait les commandes de la Barcelona World Race. C’est donc avec bonheur et satisfaction que les deux hommes franchissaient ce matin le rocher mythique, après avoir connu une nuit plutôt rude le long de la pointe chilienne.
Jean Pierre Dick : « C’est un grand moment ce passage du cap Horn. Assez spécial aussi. Au levé du jour, mais toujours dans l’obscurité, on a distingué une masse énorme, comme une ombre, une silhouette. Le feu du cap était encore éclairé. J’ai réveillé Damian. Ce n’est pas tous les jours que l’on passe par là – pour Jean Pierre, c’est la deuxième fois, pour Damian, la septième -. C’est un moment fort qui est aussi la consécration de beaucoup de travail et de deux mois de mer. »
Michèle Paret, à bord de Temenos II, leur rendait hommage et livrait sa propre vision du cap Horn : « le maître-mot, c’est délivrance. C’est aussi un moment de recueillement. On quitte un endroit mythique, historique et on laisse derrière nous le stress et la peur. Je suis contente pour eux, ils font une course superbe, une course sans faute ».
11 janvier 2008 – Jour 62
Le cap Horn est désormais à une grosse journée de mer de l’étrave d’Hugo Boss, qui ces dernières 24 heures a fait parler la poudre en affichant une moyenne proche de 20 noeuds. Moins de 850 milles devant, Paprec-Virbac 2 a "joué l’intérieur" en privilégiant une route à l’ouest des îles Malouines.
"Il y avait une grosse dépression devant nous hier, il a fallu faire un choix", expliquait cet après-midi Jean-Pierre Dick. "Il était plus prudent de passer à l’ouest des Malouines, car le vent était très fort à l’est et qu’il n’est pas raisonnable de passer au vent de la terre alors que l’on risque de rencontrer 50 ou 60 noeuds."
Pour Hugo Boss, la dernière ligne droite avant le Horn s’annonce plus "paisible" que pour le leader. Leur passage du rocher lui-même devrait également s’effectuer dans des conditions raisonnables : "nous avons un peu ralenti", notait Andrew Cape.
La lutte entre Mutua Madrileña et Temenos II, troisième, se poursuit dans un contexte de jeu tactique des plus réduits. En effet, la dernière porte de sécurité "glaces" conditionne la route à suivre, tout comme la vaste zone infestée d’icebergs se trouvant dans le sud des deux navires
A 3610 milles des leaders, Educacion Sin Fronteras était cet après-midi dans l’expectative – un joli coup de vent annoncé, et tardant à venir. "Le baromètre est descendu à fond, et le vent ne montait pas", s’étonnait Servane Escoffier.
12 janvier 2008 – Jour 63
Hugo Boss n’est plus qu’à quelques dizaines de milles de la « délivrance Atlantique ». Le passage du cap dur est prévu en début de nuit pour la paire anglo-saxone.
Dilemne tactique à venir pour Jean-Pierre Dick et Damian Foxall : droit devant eux se profile un anticyclone.Le leader risque de n’avoir guère d’autre choix que de poursuivre sa remontée le long des côtes Sud Américaines, dans du vent de face. perspective peu réjouissante.
A 2000 milles plus à l’Est, au niveau de la porte des glaces n° 3, au cour du Pacifique, le décor est bien différent pour Temenos II et Mutua Madrilena : « On a 40 nouds, on file à 20-24 nouds, on a dû réduire la toile. Il y a des paquets de mer en permanence sur le pont. Les embruns font mal. Il pleut beaucoup. il fait froid.. Plus vite nous irons, plus vite nous sortirons d’ici ! », lançait Javier Sanso à la vacation du jour. Quelques 300 milles dans leur sillage, Servane Escoffier et Albert Bargués attendent un fort coup de vent d’Ouest : «On se prépare pour le coup de vent à venir… on commence à avoir l’habitude ! Jusqu’à présent, les prévisions se sont révélées plus pessimistes que la réalité. Nous naviguons de façon sécuritaire, c’est une bonne manière de préserver le matériel », précisait Servane.
13 janvier 2008 – jour 64
Alex Thomson et Andrew Cape ont franchit le cap Horn à 2h15 heure française dans des conditions clémentes : 15-20 nouds de vent portant.
Les conditions météo sont au contraire très dures pour Temenos II et Mutua Madrilena, mais les duelistes ont au moins le plaisir d’avancer vite sur la route directe. Comme le prouve cet incroyable surf de Mutua Madrilena de plusieurs secondes à 30 nouds avec une pointe à 36,9 nouds ! « On se croirait dans une machine à laver ! » raconte Javier.
« Ce front devrait nous permettre de progresser à bonne allure encore plusieurs jours, avant de nous lâcher à 1000 milles environ du Horn», expliquait Dominique Wavre. Le cap sud américain est encore à quelques 2000 milles (3700 km) de leurs étraves. Leurs trajectoires directes les obligent cependant à traverser une zone minée d’icebergs. « Ma seule préocupation est que nous sommes dans une zone dangereuse. Mais cela ne devrait pas durer plus de 36 heures. Ce qui limite les risques », avoue le skipper de Mutua Madrilena.
La fatigue commence à se sentir à bord d’Educacion sin Fronteras qui a passé une nuit difficile : un mauvais empannage a causé la casse de 3 lattes. Servane et Albert ont bataillé 3-4 heures pour afaler, réparer et hisser à nouveau leur grand voile. Ils sont à 2 500 milles, soit environ 10 jours de mer du cap Horn.
Classement du 13 janvier à 14h GMT
1. PAPREC-VIRBAC 2 à 5906 milles de l’arrivée
2. HUGO BOSS à 861 milles du premier
3. TEMENOS II à 2690 milles du premier
4. MUTUA MADRILENA à 2795 milles du premier
5. EDUCACION SIN FRONTERAS à 3592 milles du premier
ABD. VEOLIA ENVIRONNEMENT
ABD. ESTRELLA DAMM
ABD. DELTA DORE
ABD. PRB