« Le vent l’emportera… » Gerard Marin peut déjà chantonner : il semble toujours en passe de prendre la tête de toute la flotte sur son Pogo-2 ! Logiquement, cela devrait arriver mercredi lorsque le front froid va descendre du Nord Ouest sur les Minis, accélérant encore le rythme de l’Hispanique. Et ce nouveau flux devrait en plus accompagner le retour incroyable du skipper de Escar l’escala-CN Llanca, jusqu’aux Sables d’Olonne puisque, à suivre, une dépression va le rattraper et atteindre la France, le portant jusqu’à la ligne… En ce mardi après-midi, la vitesse de l’Espagnol a un peu chuté (mais reste toujours supérieure à 7 nœuds) parce qu’il est sur la bordure Nord de la dorsale anticyclonique. Mais cette phase est passagère et les simulations le prédisent pour vendredi soir en Vendée.
Le seul qui semble pouvoir l’inquiéter est finalement Adrien Hardy (Brossard), qui a sérieusement rétrogradé ces dernières heures en choisissant de se recaler plein Nord, et qui lui concède une quarantaine de milles. Le vainqueur de la première étape en prototype a enfin touché la brise salvatrice et déboule de nouveau à plus de huit nœuds sur la route directe. Car ceux qui mènent encore la danse, à cent voire 150 milles plus au Sud, n’apparaissent pas en position favorable, même avec leur 80 milles d’avance… à l’image du leader du jour, David Sineau (Bretagne Lapins). Car le changement de situation météo n’est pas à l’avantage des « Sudistes » : si en ce mardi, ils pouvaient encore tailler la route au près à six nœuds, bâbord amure dans une brise de Nord douze nœuds, au fur et à mesure qu’ils se rapprochent du cap Finisterre, le vent va monter à 25 nœuds et plus, avec une mer formée et une brise qui basculera au Nord Est : pile dans le nez ! La progression vers le but va en prendre un sacré coup… A moins que le leader et ses quelques poursuivants (Laureyssens, Joschke, Salabert, Mihelin, Brennan, Despres), n’arrivent par chance à glisser sur un seul bord pour parer les falaises ibères. Ils vont de toutes façons en baver dans du vent frais et contraire, et perdre du terrain. Et s’ils sont obligés de virer de bord vers le Nord pour déborder l’Espagne, leur bénéfice va fondre comme une action de start-up lors de la bulle Internet…
A la recherche du vent perdu
Derrière, les prototypes retardés et le gros paquet des voiliers de série, bloqués pendant deux jours dans des calmes redoutables, n’ont pas trop d’illusions à se faire : il semble impossible qu’un autre bateau de production puisse revenir sur Gerard Marin. Non seulement, l’Espagnol va vite, mais en plus il possède cent milles d’avance sur le second et 150 milles sur le peloton ! Le vainqueur de la première étape en voiliers de série, le Portugais Francisco Lobato (BPI) est relégué à plus de 140 milles, le second à Horta Jean-François Quélen (Galanz) à 110 milles et le troisième aux Açores Antoine Debled (ADD Modules) à près de 200 milles… Comme Gerard Marin a terminé quatrième de la première étape avec seulement 1h21 de retard, il possède désormais un bon matelas de marge.
Au moins, toute la flotte va pouvoir de nouveau retrouver des sensations et surtout l’impression que la course a une fin. Parce que passer deux jours à moins de deux nœuds de vitesse a de quoi rendre dingue ! Là, le front froid va amener de l’air frais, et les glissades de la première étape vont enfin pouvoir se renouveler. A l’image de Dominique Barthel (Yamm) qui a cassé son safran bâbord depuis une journée et demie et qui file désormais bon train en se permettant même de remonter au classement, grâce à sa position plus Nord !
Pour résumer : le vent perdu est revenu ou reviendra la nuit prochaine pour balayer toute la flotte. Il sera portant pour tous les retardataires et contraire pour les leaders (sauf ceux au Nord). Les écarts abyssaux constatés ce mardi (plus de 350 milles entre le premier et le dernier, soit un tiers du parcours entre Horta et Les Sables d’Olonne) vont en partie se combler. Les vitesses vont prendre des tours par l’arrière et si le premier de cette deuxième étape devrait arriver vendredi soir, le gros de la flotte est quand même attendu le week-end prochain. Enfin, le leadership des partisans du bord rapprochant devrait changer de main d’ici 48 heures : l’Ibère semble s’envoler vers la victoire d’étape au scratch, peut-être même vers le titre au classement général des deux étapes…
Source Les Sables – Les Açores