Jean-Pierre Nicol aux commandes dans les calmes

Bernard Controls Jean-Pierre Nicol
DR

Très spectaculaires ces chamboulements d’un pointage à l’autre ! Ce mardi soir c’est Jean-Pierre Nicol qui passe à la caisse… après être passé à la casse : alors qu’il n’a plus de grand spi quasiment depuis le départ de cette première étape, le skipper de Bernard Controls prend les commandes ! Pour l’anecdote, il a gagné 33 places en 24 heures… alors que Michel Desjoyeaux, encore 2e à 15h, en perd 28 en quatre heures pour se retrouver 30e à 19h ! Qui aura raison demain, entre ces deux idées distantes d’à peine 25 milles en écart latéral – Desjoyeaux et la meute dans l’ouest ou bien Nicol et Rivet dans l’Est ? Il faudrait une très efficace boule de cristal pour le prédire… 

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Car voilà, les 100 derniers milles vers Porto vont se jouer sous haute tension. Oublié le vent fort de l’aube et le coup d’accélérateur de la nuit, suite au renforcement de la brise à plus de trente nœuds (jusqu’à 38 nœuds !) au large du cap Ortega, renforcement qui a été passager mais redoutable : certains comme Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012) sans tangon et avec un spi à réparer, tels les Britanniques Jackson Bouttell (Artemis 77) et Henry Bomby (Rockfish) sans grand spi, ou Jean-Paul Mouren (SNEF) qui n’a plus de voile ballon à envoyer, ou encore Nicolas Lunven (Generali) qui a dû subir quelques déboires pour pointer à la 33ème place et Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) qui a enroulé sa voile autour de l’étai pendant quelque temps… ont subi de plein fouet cet assaut brutal avec quelques avaries. Mais c’est le Basque Amaiur Alfaro (Région Aquitaine –Ateliers de France) qui est certainement le plus handicapé avec son pilote automatique en vrac et son spi en lambeaux.

Certains ont pu passer sans dégât en jouant finement les bascules de vent et surtout les couloirs de brise qui semblaient plutôt s’installer au large : Xavier Macaire (Skipper Hérault) a ainsi réalisé un retour spectaculaire par l’extérieur du virage quand Michel Desjoyeaux et Alexis Loison se recadraient intelligemment plusieurs fois vers l’Ouest pour s’extirper du peloton. Et au passage du cap Finisterre, arrondi à plus de quinze milles par les leaders vers 14h ce mardi, la sanction tombait soudainement lorsque la brise de secteur Nord-Est d’une quinzaine de nœuds s’envolait pour laisser place à un tout petit souffle portatif !

En quelques dizaines de minutes, les deux à cinq milles que les deux leaders d’alors avaient cumulé à l’issue de la nuit se réduisaient à peau de chagrin avec pas moins de vingt solitaires en moins de deux milles… Et surtout, cet arrêt buffet au large était concomitant à l’arrivée d’un petit souffle plus à l’intérieur du « virage espagnol » pour des poursuivants qui pensaient être décrochés ! Ainsi en est-il pour Jean-Pierre Nicol (Bernard Controls) qui a pourtant déchiré son grand spinnaker dès la sortie de l’estuaire de la Gironde et qui prend le leadership ce mardi soir! Tout simplement en obliquant vers Porto plus tôt que tout le reste de la flotte, avec cinq milles seulement d’écart latéral sur le gros du peloton…

Et Jean-Pierre Nicol entraîne dans son sillage Frédéric Rivet (DFDS-Seaways), Nicolas Jossier (In Extenso-Experts comptables) et le Britannique Edmund Hill (Artemis 37). Mais la surprise vient surtout du « bleu » Joan Ahrweiller qui s’est totalement démarqué de la flotte dès le lever du jour pour continuer son bonhomme de chemin à raser les côtes espagnoles. Au point d’avoir à empanner plusieurs fois pour ne pas finir au pied des falaises. Or si son option solitaire ne porte pour l’instant pas ses fruits (il était pointé à la 16ème place à 15h), il était l’un des plus rapides en bénéficiant d’une brise thermique qui ne se développe pas au large…

Arrivée improbable

Dans ces conditions, avec une météo assez incertaine pour les heures à venir, impossible de prédire quand les leaders vont pointer leur étrave sur la ligne d’arrivée à Porto ! Il ne reste pourtant qu’une centaine de milles à parcourir mais la bulle sans vent qui s’est installée au large des côtes espagnoles peut fort bien prendre racine… Et côté rives, l’effet thermique de jour doit s’étioler au coucher du soleil pour laisser place à une mer d’huile et des calmes prolongés.

Il est donc probable que cette fin de première étape de La Solitaire du Figaro traîne en longueur et des arrivées après trois jours et trois nuits en mer sont envisageables. Mais en pleine nuit dans le cul-de-sac de la baie de Porto, il n’y a la plupart du temps, pas un souffle d’air… Après le sérieux shaker de la nuit dernière et la pétole annoncée pour finir, les 41 solitaires vont arriver rincés au Portugal et il y aura du travail à terre pour réparer tous les bobos des vracs sous spinnaker.

Ils ont dit

Xavier Macaire (Skipper Hérault) : « L’option bien dans l’Ouest a payé la nuit dernière en passant par le large. J’ai eu du vent fort pendant longtemps, c’était un peu de la survie d’ailleurs. Cela m’était déjà arrivé sur la Transat 6.50 de me faire peur et là encore, je me suis fait peur. Ce sont des conditions exceptionnelles qu’on a rencontrées. Il a fallu réduire et évidemment, j’ai commencé par prendre un ris dans la grand-voile. Je voulais essayer de passer avec le grand spi et un ris mais j’ai du me rendre à l’évidence, ça ne passait pas. J’ai donc mis le petit spi. Il y a eu quelques départs au tas mais pas de soucis. Ce que je crains, c’est que la météo annonce des vents très mous voire inexistants dans les heures à venir.”

Joan Ahrweiller (Région Basse Normandie) : « J’ai misé plutôt sur l’option thermique. J’ai toujours toutes mes voiles en bon état. J’ai encore toutes les cartes pour le final qui s’avère plus que délicat.Ca ne me dérange pas plus que ça d’être seul. Entre pas beaucoup de vent et un thermique modéré j’ai choisi le thermique. Là j’ai un vent de Nord pour un petit 8 nœuds et une mer très plate : ca glisse doucement. »

Classement de 19h



1      BERNARD CONTROLS Jean-Pierre Nicol à 100,6 milles

2      DFDS SEAWAYS Frederic Rivet à 0,5 milles

3      PRATI BUCHES Vincent Biarnes à 2,3 milles

4      IN EXTENSO EXPERTS COMPTABLES Nicolas Jossier à 2,6 milles

5      GROUPE QUEGUINER – LEUCEMIE ESPOIR Yann Elies à 2,7 milles

6      BANQUE POPULAIRE Armel Le Cléac’h à 2,9 milles

7      BRETAGNE CREDIT MUTUEL PERFORMANCE Anthony Marchand à 3,0 milles

8      MAITRE COQ Jérémie Beyou à 3,1 milles

9      SEPALUMIC Frédéric Duthil à 3,2 milles

10  VENDEE Morgan Lagravière à 3,4 milles.