
La longue chevauchée de Ian Lipinski (Griffon.fr) ne lui aura pas permis de détrôner Bertrand Delesne, toujours titulaire du record de distance parcourue en 24h. Mais le potentiel du bateau et de son skipper laisse augurer que ce n’est que partie remise. Ce ne sera toutefois pas pour cette première étape : les vents mollissent sensiblement aux abords des Açores et vont freiner la progression de la flotte.
Retour aux navigations à l’ancienne : la balise de Ian Lipinski n’a pas tenu la charge et a cessé d’émettre. Mettant skipper et organisation sur le même pied d’égalité. Pas Tout à fait toutefois, puisque l’organisation espère pouvoir détecter le signal AIS de sa VHF quand il sera en approche des îles des Açores. Les reliefs élevés des différentes îles permettent d’avoir des antennes relais qui portent très loin et il n’est pas rare de détecter la position d’un bateau à l’AIS alors qu’il est encore à plus de 50 milles de l’archipel. C’est ce qu’espère la direction de course, d’une part pour anticiper l’arriver du futur vainqueur, d’autre part pour pouvoir informer ceux qui suivent l’épreuve de la position du proto Raison.
Hautes pressions, basses vitesses
Jusqu’ici les solitaires ont bénéficié de conditions météo quasiment parfaites. Hormis les premiers milles dans le golfe de Gascogne dans des vents faibles, les jours suivants ont vu toute la flotte débouler aux allures portantes, tribord amure, à belle vitesse. Mais ces navigations idylliques devraient prendre fin d’ici samedi. A l’exception de Ian Lipinski qui pourra peut-être franchir la ligne à temps, les concurrents devraient être confrontés à des vents erratiques aux abords de l’archipel. L’anticyclone semble vouloir descendre en latitude et se positionné légèrement dans le nord-ouest de Faial, point d’arrivée de cette première étape. On va donc passer progressivement d’un régime de nord-est à est, à des vents qui vont tourner au nord et mollir franchement. Dans ces conditions, la navigation au portant se révèle vite être un enfer, le vent généré par la vitesse du bateau s’oppose au régime général et le résultat est plutôt catastrophique en terme de progression. Pour peu qu’un fond de houle persiste et ce sont les voiles qui battent, le bateau qui est ballotté par les vagues, des heures usantes pour les nerfs. C’est ce que le skipper suisse Valentin Gauthier (Shaman) appelle la « gaule molle ». Les idiomes lémaniques ont encore de beaux jours devant eux.
Chamboule tout
En série, l’avance de Tanguy Bouroullec (Kerhis CERFrance) va-t-elle se maintenir ? Sur sa position très au nord, le leader semble déjà subir les effets de la descente de l’anticyclone vers le sud. Alors que ses adversaires continuent de progresser à près de 9 nœuds, Tanguy n’affichait plus, au classement de 17 heures, qu’un peu plus de six nœuds. Trou de vent passager ou bien tendance lourde, les signes précurseurs de la pétole à venir sont bien là. Maintenir le rythme du bateau devient plus difficile, là où quelques heures auparavant on avait le sentiment de glisser sans effort sous pilote automatique, il faut
travailler les réglages fins, voire s’emparer de la barre pour retrouver des sensations. Pour les régatiers, la navigation dans du petit temps est tout sauf une sinécure. Dans ces conditions, Jonas Gerkens (Volvo), Henri Patou (Défense Assurances) ou bien encore Thomas Dolan (Offshoresailing.fr) ont tout à craindre de l’aisance d’Ambrogio Beccaria (Alla Grande Ambecco). De même Frédéric Moreau (Petit Auguste et Cie), Nolwen Cazé (Fée Rêvée) ou Pierre Revol (As de Cœur II) respectivement deuxième, troisième et quatrième des « étraves pointues » voudraient bien laisser quelques bateaux de dernière génération derrière eux. Le temps à venir devrait s’y prêter.
Nord ou sud
En approche des Açores, ce sera bientôt l’heure des choix. La route usuelle, celle empruntée par 80% des concurrents passe au nord de l’archipel. Les îles de Graciosa et Terceira ne sont pas trop élevées et les perturbations dues à leur relief restent assez faibles. Le canal entre Sao Jorge, Pico et Faial est plus délicat, mais la distance à parcourir est courte. Il reste que si les vents s’orientent au secteur nord, cela signifie une navigation au portant dans des vents faibles, ce que déteste tout coureur au large normalement constitué. Une arrivée par le sud, pourrait permettre de naviguer à des allures proches du vent et de conserver de la vitesse. Mais gare au dévent du Pico et ses 2350 mètres d’altitude. Ce n’est pas choisir entre Charybde et Scylla, mais aucun des deux solutions n’apparaît comme étant totalement évidente. Il va falloir du cran, de l’inspiration et peut-être un brin de chance pour rallier Horta sans encombre. Les prochaines heures vont être
Classement au pointage de 17h (TU+2) : Séries : 1 Tanguy Bouroullec (Kerhis CERFrance), à 450,6 milles de l’arrivée 2 Jonas Gerkens (Volvo) à 33,3 milles 3 Henri Patou (Défense Assurances) à 38,3 milles 4 Ambrogio Baccaria (Alla Grande Ambecco) à 41,8 milles 5 Tom Dolan (Offshoresailing.fr) à 50,7 milles