Alain Thébault est un doux rêveur et un obstiné. Depuis plus de 20 ans il porte le projet Hydroptère et les revers et les fortunes de mer ne lui ont pas été épargnés. Il fallait donc avoir la foi pour continuer à porter ce projet que lui avait transmis Eric Tabarly. Thébault qui est un bigouden a la carapace dure mais aussi un affectif aurait aimé offrir plus tôt ce record à son modèle et protecteur disparu en Juin 1998 . " Mais les choses ont été plus compliquées que nous le pensions " confie t-il.
Le mur du vent
Avec ce run de 500 mètres à 51,43 noeuds avec une pointe à 55,5 noeuds ( 103 km/h), sa ténacité a enfin été récompensée. Il a enfin franchi " ce mur du vent ", titre de son dernier ouvrage qui raconte l’histoire aussi riche que mouvementée de l’hydroptère. Il faut se souvenir qu’en décembre 2008 l’hydroptère avait chaviré sur la base de Port St Louis du Rhône peu après avoir été chronométré à 61 noeuds. Il a fallu se relever de ce coup du sort.
Cette performance qui permet au trimaran volant de devenir l’engin le plus rapide de la planète est " une oeuvre collective. Ce record a été décroché vendredi lors de la première journée d’essais avec un vent de 28 noeuds de secteur ouest. "L’équipage a été impérial au cours de cette journée. Ce fantastique record est l’ illustration d’une œuvre collective, celle d’un pack hydroptérien soudé et déterminé. Les envolées à plus de 100 km/h (pointe à 55, 5nœuds) génèrent à bord des poussées d’adrénaline comme nous n’en n’avions jamais vécues. A ces vitesses on ne peut plus lire les instruments. Tout le monde annonce ses données dans le cockpit et je m’applique à garder la bonne trajectoire ". Le pilote de cet engin ne compare pas ce run à un numéro de funambule car " la vitesse repose sur une stabilité hydrodynamique obligée et qu’on a validée jusqu’à 56 noeuds. Là le bateau était sur des rails comme un TGV ".
Une aventure technologique
Ce record est une étape marquante dans une aventure technologique dont la poursuite a été possible grâce au soutien depuis 2005 de M. Thierry Lombard, Associé – gérant de la Maison de Banquiers Privés à Genève. Ce mécène est aussi à l’origine du partenariat avec l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne dont les enseignants et étudiants habités par le projet ont apporté leur compétence en aéro et hydrodynamique, en matériaux composites et dans le domaine structurel. Il ne faut pas oublier dans l’histoire le soutien de huit ingénieurs aéronautiques retraités mais toujours impliqués bénévolement. Ils partagent depuis le premier vol l’engagement d’Alain Thébault.
" Cela fait du bien pour toute l’équipe d’avoir un peu de réussite " avoue Alain Thébault joint par téléphone. Il pense que cette performance peut être encore améliorée : " On va s’appliquer à finir cette campagne avec élégance. On peut peut être porter le record à 52 , voire 53 noeuds on verra… ". Mais Thébault sur son nuage a aussi le regard tourné vers le large. Car son ambition déclarée depuis longtemps est d’emmener son engin détenteur du record absolu de vitesse dans des navigations hauturières et de s’attaquer à des records océaniques. " Ce sera l’objectif de 2010 et je réserve une surprise sur le parcours" conclut -il .
Source : Le Télégramme