Sortis du Pot au noir, les 5 Imoca engagés dans cette deuxième étape Cap-Vert – Le Cap plongent vers le sud. Guyot-Environnement avec Sébastien Simon à la stratégie a réalisé un joli coup et pointe en tête avec 60 mn d’avance sur Holcim, 2e.
A bord de l’ancien Hugo Boss l’ambiance est à la confiance, et l’équipe, skippée sur cette étape par le régatier olympique allemand Robert Stanjek, savoure sa position en tête du classement après presque six jours de mer depuis le départ de la seconde étape depuis le Cap-Vert. Plus tôt dans la journée, Guyot environnement-Team Europe, dont l’équipage comprend également le navigateur et tacticien français Sébastien Simon, la Française Anne-Claire Le Berre et l’Allemand Phillip Kasüske, a été le premier à franchir l’équateur alors que les bateaux reprenaient de la vitesse en touchant les premiers alizés du sud-est.
L’IMOCA noir possède une avance de 60 milles sur ses poursuivants qui ont choisi ou sont contraints d’aller vers la côte brésilienne pour aller aussi vite que Guyot. De manière significative, Guyot environnement-Team Europe a également parcouru le moins de milles pour atteindre l’hémisphère sud – un total de 1 269 milles, soit 6 milles de moins que Biotherm, 135 milles de moins que Team Holcim-PRB, 144 milles de moins que Mãlama, et 231 de moins que Team Malizia.
Dans un entretien avec la Classe IMOCA, Robert Stanjek, skipper du bateau sur cette deuxième étape, explique comment l’équipe s’est frayée un chemin après un départ en demi-teinte. En effet, l’équipage fermait la marche à l’ouest du peloton, tandis que les autres filaient plein sud depuis Mindelo.
“La première nuit, nous nous sommes retrouvés du mauvais côté du jeu, alors les autres bateaux plus à l’est ont pris de l’avance en touchant plus de pression”,déclare Robert. “Mais nous sommes restés patients. Nous avons continué à naviguer ; à aller de l’avant, puis nous avons pu sortir l’A2 sur quelques très beaux angles de vent arrière.”
Robert Stanjek affirme que Sébastien Simon a été excellent pour faire fonctionner le bateau dans des conditions de vent très variables, tant en angles qu’en pression. “Il a été très patient avec ces bascules très oscillantes“,explique-t-il. “Nous avons fait cinq ou six empannages et bien réussi à progresser pour recoller avec la flotte. Puis, sa décision a été de nous positionner un peu plus à l’est que les autres, et de rester à l’intérieur par rapport à la route directe.“
Au début, Sébastien craignait qu’ils aient fait un mauvais choix, car les bateaux à l’ouest, Biotherm en tête, menaient la danse dans les vents légers et variables du Pot-au-Noir. Et finalement, la position de Guyot environnement-Team Europe a porté ses fruits. Selon Robert, l’équipage a réussi à naviguer sur une route plus directe et efficace vers le sud.
“Je suis très fier de la façon dont toute l’équipe a travaillé de manière très précise en naviguant sur une trajectoire stable vers le sud”, déclare-t-il. “Si vous regardez la cartographie, les lignes des autres bateaux sont beaucoup plus nerveuses que les nôtres, avec quelques empannages et des angles d’adaptation. Nous avons vraiment essayé d’investir dans chaque mètre pour gagner vers le sud, et je pense que c’est probablement l’un des secrets de notre réussite actuelle.“
L’équipe de Guyot environnement-Team Europe apprend en permanence comment tirer le meilleur parti de son bateau, qui a sept ans de plus que les quatre autres IMOCA de cette course. Robert dit qu’il essaie de ne pas s’inquiéter du fait qu’ils pourraient avoir du mal à être compétitifs dans toutes les conditions face à leurs rivaux plus récents.
“Notre bateau est sept ans plus vieux et un peu plus lourd, donc nous naviguons simplement sur un bateau différent et nous devons en tirer le meilleur “, explique-t-il. “C’est aussi une étape complexe, avec d’importants ajustements pour trouver les bons réglages et prendre les bonnes décisions en matière de tactique et de routage. Vous savez, vous devez bien connaître ces bateaux pour performer, donc je ne veux pas trop me prendre la tête pour l’instant.“
Le marin berlinois raconte que sa famille lui manque mais il savoure chaque minute passée sur The Ocean Race et notamment de son premier passage de l’équateur. ”J’apprécie énormément cette course”, déclare-t-il. “Pour moi, c’est la première fois que je navigue dans l’hémisphère sud, que je traverse l’équateur, que je suis dans les alizés et le Pot-au-Noir, et tout cela est très excitant. J’apprends beaucoup, vraiment beaucoup. Je viens de la voile olympique, et je suis très enthousiaste de tout ça. En fait, je n’ai jamais autant aimé la voile qu’en ce moment.“
Nous avons demandé à Robert son regard sur Sébastien Simon et sur Benjamin Dutreux, qui dirige la campagne dans son ensemble. Benjamin Dutreux skippait l’équipe sur la première étape et sera de retour pour la troisième dans les mers du Sud. Il prend un peu de repos après une période d’enchaînement intense entre la Route du Rhum et The Ocean Race. Robert Stanjek affirme que ce sont deux personnalités contrastées, mais tout aussi efficaces à bord.
“Ils sont un peu différents, mais j’aime naviguer avec les deux“,explique-t-il. “Il faut un certain temps pour comprendre comment travailler ensemble, établir une communication efficace et il faut aussi un certain temps pour comprendre quand on peut demander certaines choses, quand ils sont probablement trop stressés et trouver la meilleure façon d’échanger. Sébastien est beaucoup plus rationnel – Ben est plus émotionnel, mais ils font tous les deux du bon travail et je suis très heureux de cette étape. Nous avons fait quelques erreurs, mais nous avons aussi pris beaucoup de très bonnes décisions.“
Benjamin Dutreux, à terre commentait la trajectoire de son équipe : “La difficulté dans le passage du Pot-au-Noir, c’est de trouver une porte qui te permette de passer sans être trop ralenti. Tu dois constamment jouer avec les nuages, les cartes satellites, les prédictions météo, etc. C’est compliqué d’anticiper ce qui s’y passe, les phénomènes sont très rapides. Les nuages y grandissent très vite et s’y épuisent tout aussi vite. Je pense qu’ils ont essayé de passer le plus à l’est possible pour raccourcir au maximum leur route, ils ont dû voir une ouverture sur les cartes satellites. Ils ont plutôt bien avancé ces dernières 24h, c’est encourageant, mais les conditions changent tellement vite qu’ils pourraient aussi se retrouver coincés ! Des fois, on a l’impression qu’on est à la sortie du Pot-au-Noir et d’un coup, il n’y a plus de vent et on est à l’arrêt. J’espère qu’ils vont retrouver des nuages qui ressemblent à des nuages d’alizés du sud et que ce sera bientôt fini. Pour l’instant, leur progression est plutôt bonne et il faut retenir que toute la route qu’ils n’ont pas faite vers l’ouest est un gain pour après. S’ils sortent du Pot-au-Noir sur une ligne d’égalité avec les autres, ils auront un meilleur angle pour descendre vers le sud. On suit ça de près !“
Robert Stanjek nous a rappelé qu’il y a encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’atteindre Cape Town, suffisamment pour que Biotherm, Holcim-PRB ou 11th Hour Racing Team se réaffirment en tête du classement, tandis que Team Malizia, poursuit ses efforts pour rattraper son retard.
Ed Gorman (traduit de l’Anglais)