La chevauchée fantastique d’IDEC aura connu son apogée ce dimanche soir lorsque le trimaran rouge est passé devant Spindrift au large de la Nouvelle Zélande.
Le mot duel était prononcé au départ de la course comme un teaser surtout pour Spindrift qui s’en régalait d’avance. Au bout de 4 jours, il a été mis sous le boisseau tant la descente de l’Atlantique Nord a été rapide. Et si les deux trimarans étaient en avance sur le record, très vite Spindrift a fait parler la poudre et dépasser son concurrent parti avec deux heures d’avance. Alors personne n’a plus parlé de duel. On s’est attaché à rapporter la trajectoire de chacun, les milles d’avance. Par vacations interposées, aucun ne parlait de l’autre.
Quand les deux trimarans sont arrivés proches de l’anticylone de Sainte Hélène, Spindrift a pu s’accrocher au wagon et prendre le train de la dépression quand l’équipage de Joyon s’est vu reléguer très loin. Au Cap de Bonne Espérance, c’est avec un regard un peu compatissant que l’on voyait IDEC et puis 800 miles de retard…que dire. Pourtant c’est bien Joyon et son équipage qui continuaient d’y croire. La communication est devenue plus fine. Une communication plus mesurée des deux côtés quand Spindrift a commencé lui aussi à perdre toute son avance.
Au Cap de Bonne Espérance, on en était chez Joyon à se dire : “On l’avait prévu.” Au début, c’était : “on veut être à égalité”, puis devant le retard accumulé ” On veut avoir le minimum de retard” avant de se rendre à l’évidence, plus de 800 milles… Mais il fallait relativiser. 800 milles c’est une demi-journée ou une journée. C’est pas grand chose.
Côté Spindrift, la gestion de l’avance et du retard a été savamment calculée mais cela n’a pas suffit. Et encore moins, au Cap de Bonne Espérance -12 minutes de retard, puis pire au Cap Leeuwin. Oui le record de l’Ocean Indien a été battu. Puis quelques heures après, battu par IDEC !
Yann Guichard a admis regarder ce que faisait IDEC. Eux étaient devant avec une dorsale en plus qui leur barrait la route. Pas le choix, impossible d’aller plus vite. Derrière, IDEC a tracé sur une route plus sud et est revenu comme un fou. En trois jours le trimaran rouge a refait tout son retard. Il est revenu à la hauteur de Spindrift. Et ce soir, Francis Joyon avec ses cinq équipiers ont dépassé le grand Spindrift et ses 14 hommes d’équipage presque à la moitié du parcours de ce grand Tour du Monde. Alors Francis, toi qui prend le temps de saluer la mer, de t’arrêter pour regarder les oiseaux, d’humer la terre au passage des îles, bravo. Bravo pour l’humilité et la simplicité.
Comme dans un film on a envie de saluer le courage du moins fort, celui qui tente de battre un Record mais pour qui cela ne semble pas une fin en soi, celui qui continue à se battre et qui y croit malgré les milles perdus, on a envie de saluer la modestie. Dans ce duel, il y a peut être plein de symboles entre IDEC et SPINDRIFT qui s’opposent alors à mi-course, bravo.
On ne serait pas à la hauteur si on ne saluait pas Spindrift aussi. Finalement ce record de Loïck, ce n’est pas une partie de plaisir. Ce n’est pas facile. Il faut le faire et y aller et combien sommes-nous à rêver de le faire et si peu à en être capable.
Ce Trophée Jules Verne, sur Course Au Large on est heureux de le suivre et de vous le faire vivre en direct du matin jusqu’au soir mais surtout de le partager avec vous.
-180 milles de retard pour Spindrift, -206 milles pour IDEC, il reste encore 23 jours et quelques heures de mer avant de revenir à la maison et qui sait … recevoir ce magnifique Trophée. Une grande aventure humaine.