Des empannages pour doubler le Horn

Groupama 3
DR

À environ 600 milles du cap Horn, l’atterrissage sur les côtes chiliennes n’est pas prévu avant jeudi en début d’après-midi, mais il n’est pas encore sûr que Franck Cammas et ses neuf équipiers rasent de près ce rocher mythique. Une borne légendaire qui fait rêver tous les marins du monde mais qui n’engage pas à rester trop longtemps dans ces parages mouvementés…

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« On est un peu secoué et en fin de quart, on a vraiment froid. On se bat contre l’humidité ! Côté navigation, on avait très bien commencé cet océan Pacifique, mais après, ça ne s’est pas passé comme prévu. On est un peu déçu d’avoir perdu autant de temps pour gérer cette dépression : on pensait avoir deux jours de marge au Horn et en fait, on va passer quasiment en même temps. Mais le trimaran est en parfait état, prêt à remonter l’Atlantique : on va se refaire ! Je me souviens que sur Orange 2, nous avions été favorisés par un grand coup de pied aux fesses pour remonter le long des côtes argentines… Ce n’est a priori pas ce qui va nous arriver : il faudrait que la météo nous aide un peu, » indiquait Lionel Lemonchois (déjà cinq fois cap-hornier…) à la vacation radio de ce midi.

La mer est espérance…

Bruno Peyron et son équipage avaient dû en 2005 effectuer plusieurs empannages pour parer la pointe chilienne et cinq ans plus tard, Groupama 3 a retrouvé (depuis 6h00, heure française) quasiment la même trace, mais avec plus de 280 milles d’avance, soit pratiquement une demi-journée. Mais là encore, cet avantage va de nouveau jouer au yo-yo car avec le vent d’Ouest mollissant annoncé dès la nuit prochaine, Franck Cammas et ses hommes devront empanner plusieurs fois pour rester sur le 57° Sud jusqu’au cap Horn.

« Le jour s’est levé depuis une petite demi-heure : je suis à la table à cartes pour envoyer quelques mails en attendant de monter sur le pont avec Ronan et Fred. C’est une façon de se préparer au froid et à l’humidité qui règne dehors ! Ce sont un peu les mêmes conditions qu’hier : trente nœuds de vent, du soleil, une grosse houle de quatre à cinq mètres. Le bateau descend de grandes pentes, ambiance mers du Sud… Depuis hier soir, nous ne sommes pas très toilés avec deux ris dans la grand-voile et le petit gennaker : il n’y a pas besoin de beaucoup de toile parce qu’il nous faut abattre pour se mettre dans le sens de la mer et pour surfer sur les vagues. Si on essaye de lofer, ça devient trop brutal pour le bateau. »

… Le Horn est sa liberté

« Le vent devrait mollir en arrivant près des côtes chiliennes et la mer devrait aussi se calmer. Les routages changent tous les jours parce que la situation est assez instable : l’évolution semble indiquer une trajectoire vers le Nord-Est, vers les Falkland, contre le vent ! Mais tout ça va se préciser au passage du cap Horn. A priori, il y a souvent une transition météorologique quand on passe en Atlantique : les vents sont rarement les mêmes d’un côté et de l’autre de la cordillère des Andes. »

Les conditions de navigation vont donc sensiblement se modifier en entrant dans l’Atlantique, et l’équipage va être fortement sollicité pour s’extraire de cette zone de transition. La grande satisfaction, bien que Groupama 3 n’ait pas franchement de marge sur le temps de référence, sera d’être sorti indemne des mers du Sud et surtout, avec un trimaran en parfait état pour avaler les 7 000 milles qui restent à parcourir jusqu’à Ouessant.