Les vacations de Peyron, Paret, Aglaor, Garcia, Sanmarti, Mumbru…

    Loïck Peyron, Virbac-Paprec 3 :
    
" Tout va bien à bord même si ça bouge beaucoup. C’est même un peu difficile de roupiller. Dehors c’est assez efficace. En monocoque, c’est ultra rapide de faire les Canaries – Cap Vert en quelques heures. Hier, j’ai passé 7 heures à la barre. C’est même trop, mais le seul moyen car Jean-Pierre était occupé. Le poste de barre est bien protégé. Même du vent et donc des sensations ! Un peu plus difficile la nuit. Le reste du cockpit est trempé, il est sous des tonnes d’eau, car on traverse assez souvent des vagues. Nous rattrapons des petits systèmes de vagues. Le nez du bateau passe dessous, mais sans s’arrêter. Il y a donc quelques dizaines de centimètres d’eau sur le pont qui s’échappent par-derrière.
    La mer des alizés n’a jamais été une jolie mer contrairement aux idées reçues. C’est le pire des endroits pour surfer joliment. C’est trop court, c’est haché. C’est une petite mer chaude qui se prend pour une Mer du Sud. Mais elle n’en a pas le goût même si elle est agréable à traverser.
    Il n’y a pas de soucis de motivation à bord. Nous sommes plutôt à nous réguler tranquillement ce qui n’est pas simple. C’est vrai que c’est usant d’être devant, ou non, avec les copains d’à côté. Nous tenons un rythme intéressant. Nous le tiendrons jusqu’à ce que le vent mollisse. Heureusement, c’est pour dans pas longtemps. Il serait temps que nous rangions l’intérieur du navire et l’extérieur qui commence à ne ressembler à pas grand-chose. Tout a volé dans tous les sens. Nous n’avons pas vraiment le temps de faire attention à soi-même ni au bateau parce que cela bouge vraiment beaucoup. Je n’ai qu’une hâte c’est de retrouver du petit temps, avoir une mer plate pour pouvoir monter en tête du mât pour une révision complète. Nous pourrons prendre soin du navire et des bonshommes à l’approche du Pot au Noir.
NDLR : À l’instant même, de l’eau est rentrée en grand à l’intérieur du bateau …
Il y a beaucoup d’eau dans le bateau. Si nous enfournons par l’avant une première fois, l’eau n’a pas eu le temps de s’évacuer et au second enfournement le surplus d’eau rentre dans le bateau. Je vous laisse, je dois partir éponger. "

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    Michèle Paret, Mirabaud :

    " Nous sommes un peu tannés, secoués, fatigués. Il y a entre 25 et 30 nds et nous sommes sous spi avec 1 ris. Beaucoup de toile donc vigilance pour cause de mer croisée. Nous sommes au rythme des quarts courts pour barrer sous spi. Le pilote ne tient pas. Nous n’avons pas beaucoup de temps de faire autre chose. Les quarts durent environ 1 heure, voir moins la nuit. Nous trouvons notre équilibre comme cela. Dès que nous nous posons sur la bannette nous nous endormons tout de suite, sans même prendre le temps d’enlever le ciré. Un grand toilettage sera nécessaire à la fin des alizés. Mais ce n’est pas pour demain.
    Il n’y a pas de souci au niveau du classement. Estrella Damm est un bateau très rapide. Si nous arrivons à ne pas nous faire détacher, nous serons contents. Le bateau va bien mis à part un safran qui vibre énormément. Ça résonne énormément dans le poste des pilotes. Le bruit est identique à celui fait par une 125 cm3 qui s’élance sur un Grand Prix.
    Il n’y a pas de répit pour l’instant. D’ici 36 heures, le vent devrait être un peu moins fort. Nous avons fait de nombreux empannages sans souci ces derniers temps. Il y a quelques voiles sur le pont qui sont matossées et bien attachées, car nous nous faisons submerger assez souvent par l’eau. Mais le bateau est en pleine forme donc tout va. "

    Ludovic Aglaor, FMC :

    " Nous nous sommes décalés de l’Afrique cette nuit. Nous sommes les plus à l’Est mais nous n’allons pas à la côte. Il y a entre 22 et 26 nœuds au portant et nous portons le petit spi qui nous pousse entre 15 et 22 nœuds. C’est très agréable par rapport au petit temps ou au près. C’est bien, nous accumulons les milles. C’est  agréable, mais encore les vitesses sont faibles par rapport aux multicoques que je connais bien.
    Par rapport à nos petits camarades, nous avons choisi d’être plus dans l’Est car il y a plus d’alizés. Nous nous croisons des fois. L’idée est de pouvoir recoller au groupe de devant. Il va falloir être patient, sûrement après le Pot au Noir. Les autres bateaux sont beaucoup plus récents, plus puissants. Une fois dans le Grand Sud cela va être chaud pour revenir.
    À bord le moral va bien. Quand le vent va bien, le moral va bien. D’un point de physique, nous arrivons à nous organiser en mode atlantique. D’un point de vue nourriture, nous mangeons très correctement. Le bateau est très confortable donc pas de problème de ce côté. Nous avons un régime lyophilisé à 75% avec le reste des plats préparés sous vide ce qui est assez agréable. J’adore les fruits séchés comme les mangues, les ananas. J’en ai donc et d’autres petites sucreries que j’aime bien. "

    Bruno Garcia, Président
 :
    " Nous restons beaucoup à la barre dans ces conditions avec 25-30 nœuds de vent sous grand-voile haute et gennaker. La vitesse ne descend pas sous les 20 nœuds avec des pointes à 26. Le pilote ne tient pas la route et nous n’accélérons pas si nous ne sommes pas à la barre. D’ailleurs pour y être il faut être étanche, car nous enfournons beaucoup. Nous avons embarqué beaucoup de nourriture fraîche pour le début que nous n’avons pas entièrement mangée. Il nous reste un tour du monde et demi de nourriture à bord. Nous sommes fatigués, mais nous avons la gagne. Les alizés sont une véritable autoroute tranquille en croisière, mais en course vous ne pouvez pas vous reposer.Notre idée première était de laisser les Îles du Cap-Vert à babord et de passer à l’Ouest des archipels. Mapfre, qui va comme un avion de chasse, est très rapide. "

    Cali Sanmarti, We Are Water :
    " Nous descendons les alizés dans de très bonnes conditions. Les températures sont agréables. Au final, nous avons sorti les bermudas pour naviguer. Les nuits sont encore un peu fraîches et avec ce croissant de lune très petit la luminosité est très faible. Mais il est plus facile de naviguer ici dans la nuit noire que de jour en Méditerranée !
Pendant la nuit les quarts sont stricts et pendant la journée chacun son tour prend la barre alors que l’autre va se reposer. Nous barrons beaucoup et nous cherchons à gagner dans l’Ouest pour affronter le Cap Vert, un nouveau passage compliqué. Dans le Sud, la stratégie sera très importante dans notre groupe de retardataires. Tout ce que nous mangeons est lyophilisé. Nous avons fini nos dernières petites tomates. "

    Jaume Mumbrú, We Are Water :

    " Nous naviguons dans 20-25 nœuds de vent d’alizés avec le petit spi et un ris dans la grand-voile. Nous sommes toujours dans une houle très confise au large des côtes africaines,  même si tout cela s’ordonne alors que le vent force régulièrement. Le passage entre les îles s’est fait sous tension et a été très compliqué. Finalement, nous avons touché la pression nécessaire près de Fuerteventura ce qui nous a permis de sortir le spi. Nous aimerions bien passer à l’ouest du Cap Vert, mais je ne pense pas que cela soit possible alors qu’il y aura d’autres difficultés à négocier d’ici là. Pour le moment nous avons réussi à échapper au piège des Canaries mais celui du Cap Vert, comme le surnomme Anna Corbella, nous ne savons pas comment cela va se passer. "