La Chronique de Capian : week-End aux Baléares, tout compris.

Capian - Matthieu Girolet
DR

De fait, la première nuit j’étais content d’être aux avants postes à surveiller le feu de mât des protos qui rétrécissaient par l’avant pas si vite que je ne le craignais, au coude à coude avec mes adversaires et voyant les feux verts de nos poursuivants directs faiblissaient peu à peu sous le vent. TOP ! Le tour de Minorque se passera en chevaux de bois, sans gros changements. Approchant du dernier cap je vois les 2 bateaux juste devant moi (un proto et le premier série) virer à 90° de la route. Incrédule, je saute sur la carte. J’étais persuadé que c’était franc par là ! C’est quand même avec la tête penchée sur la carte que j’ai compris quand j’ai senti le bateau abattre et ralentir franchement. Première réaction : … ce pilote ! Je sors la tête. Et bien non, c’était pas lui (cette fois) mais un véritable trou de vent, dans lequel mes collègues étaient tombés et qui me happait à mon tour. Et nous scotchera pour un bon moment !

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Bien sûr, toute la meute en arrivant sur nous qui faseyons mollement, ne se fera pas prendre…et plusieurs concurrents commenceront à s’échapper sous spi sous le vent avant qu’on n’en sorte nous mêmes. Tout est à refaire. Restons cool, restons cool. De toute façon, à ma météo, ça doit rentrer et refuser ensuite donc tous ceux qui sont partis dessous sont morts. En théorie. En pratique, c’est effectivement rentré jusque 25 nœuds, façon piscine à vagues vidangée directement dans les bottes via la salopette. Et je suis scrupuleusement resté sur la route, à réguler à la GV toute la dernière nuit. Sauf 20 minutes de sieste quand j’y voyais plus clair. Je vous vois d’ici: 300 milles, c’est cool pas besoin de dormir! Eh bien, durant cette course justement, un concurrent nous a prouvé qu’avec l’aide d’un ou deux soucis électriques vous clouant au timon, on peut aisément se mettre dans le rouge au niveau lucidité en même pas 300 milles, si, si. Il a quand même eu des hallucinations lui faisant "voir", dans le désordre, une tornade qui l’a décidé à passer sous tourmentin et un proto, couché mat dans l’eau! Bon camarade, il a donc fait demi tour et prévenu le comité alors que (en réalité dans 10 noeuds d’air) ledit proto se barrait tranquillement tout dessus .

J’étais sur la route donc, et sans gennak pour rester haut puisque ça devait refuser. ça devait. Le temps du verbe est le bon, parce que ça n’a pas refusé, mais pas d’un poil. Moralité : je vois le soleil se lever en me disant que ceux qui ont abattu sous gennak ont dû faire le trou. Et en parlant de trou, c’est à nouveau scotchage complet à la dernière marque au petit matin. Juste entre les deux flux, permettant encore de revenir par l’arrière et avec ceux qui ont abattu qui passent en longeant la côte … Cela se finira en match race, avec un bateau – revenu de l’arrière justement – qui finalement ne passera pas. Ce sera donc une 4ème place pour nous. Avec des regrets pour cette dernière nuit mais content de m’être constamment battu dans la tête de la course. J’étais capable de cela en double, je pense que les Açores m’ont fait du bien pour le solo. Un peu comme le passage d’un cap. Remarquez, 3000 milles qui m’auraient rien apporté, je serais vraiment un cornichon !

Matthieu Girolet