Entrer dans les Quarantièmes, c’est comme faire la dernière répétition de théâtre avant de livrer sa pièce au public. Il s’agit de vérifier que tout tourne bien, penser au moindre détail, depuis le confort de vie à bord jusqu’à la marche optimale de la machine. A bord des IMOCA, on bricole beaucoup, parce que ces mers, comme le rappelait Bernard Stamm récemment, usent le matériel, mais surtout parce que passé le cap de Bonne Espérance, il n’y aura plus guère de possibilité de relâcher pour effectuer des réparations. Il faudra compter sur les seules capacités de l’équipe à résoudre les avaries éventuelles. Autant prévenir que guérir. A bord de We Are Water, les frères Garcia travaillent ainsi à résoudre quelques soucis de comportement de leur pilote automatique à grande vitesse, quand Renault Captur constate que le désalinisateur tend à se débrancher dans les surfs. D’autres équipages ont avoué sortir la boite à outils tels GAES Centros Auditivos, mais sans s’épancher sur la nature de leur mal : la compétition, c’est aussi savoir ne pas donner d’arguments psychologiques aux concurrents.
A bord de Neutrogena, on imagine facilement que Guillermo Altadill et José Muñoz auraient sûrement été tentés de prolonger leur route vers le sud. Mais, zone d’exclusion oblige, les deux navigateurs n’ont pas eu d’autre choix que d’empanner vers le nord dans une zone de vents plus faibles. Leur route converge avec celle de Cheminées Poujoulat qui, du même coup, reprend un avantage significatif à l’entrée de l’océan Indien. Rien n’est joué, mais c’est toujours agréable de marquer son territoire à l’heur e de doubler un des trois grands caps de ce tour du monde. D’autres n’en sont pas là : à bord de One Planet One Ocean & Pharmaton, Didac Costa et Aleix Gelabert ont peiné à sortir des mailles de l’anticyclone de Sainte-Hélène, quand Spirit of Hungary doit encore faire route au sud avant de mettre de l’est dans son cap.
Ils ont dit :
Conrad Colman (Spirit of Hungary) : « Le passage de dorsale est toujours difficile, surtout mentalement pour nous, car on a déjà subi beaucoup de molles depuis le départ et du coup, ça commence à faire un peu long. On est content de naviguer, mis à part le vent, ça commence à être un peu difficile. Notre heure de liberté n’est pas très loin. On va passer cette dorsale qui se décale vers le nord et on devrait trouver des conditions plus classiques pour un tour du monde. »
Bruno Garcia (We Are Water) : « (A propos de Jean Le Cam) Ça manque forcément d’avoir quelqu’un sur qui te reposer, quelqu’un qui t’apprend. Maintenant, je découvre forcément d’autres manières de naviguer que quand j’étais avec Jean. Avec lui, j’étais l’apprenti et au final, la responsabilité de la décision appartient toujours au skipper. Là, avec mon frère, on partage tout, les espoirs, les joies et aussi les responsabilités. J’aurais bien aimé que Pepe (Ribes) se mêle à la bagarre, mais l’un comme l’autre, ce sont des cracks. »
Classement à 15h
Cheminées Poujoulat (B Stamm – J Le Cam) à 17 891,5 milles de l’arrivée
Neutrogena (G Altadill – J Muñoz) à 124,9 milles
GAES Centros Auditivos (A Corbella – G Marin) à 581,7 milles
Renault Captur (J Riechers – S Audigane) à 1141,1 milles
We Are Water (B Garcia – W Garcia) à 1532 milles
One Planet One Ocean & Pharmaton (A Gelabert – D Costa) à 1883,7 milles
Spirit of Hungary (N Fa – C Colman) à 2360,1 milles