Zone de molle

@ ALexis Courcoux

Après une nuit bien agitée le temps de s’amariner pour certains, les 15 équipages ont dû faire face à un simili pot au noir et batailler toute la journée sur le pont pour tenter de faire avancer les bateaux malgré l’absence de vent et la mer chaotique. « C’est agaçant » avouait Xavier Macaire (Bretagne – CMB Performance) pointé à 1 nœud de vitesse dans la matinée. Ce soir, le vent du nord devrait rentrer pour 12-15 nœuds, de quoi envoyer les spis et glisser vers le cap Finisterre.

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Au beau milieu du Golfe de Gascogne, à la latitude de la Rochelle, la mer secoue les Figaro Bénéteau 2. Les voiles claquent. La tête en l’air, le barreur observe la girouette pour tenter de grappiller un pouillème de nœuds. A l’intérieur, à la table à cartes, l’équipier se penche sur les fichiers météo pour essayer de comprendre et se sortir de cette « molle dépressionnaire ». Sous les nuages, un coup ça freine, un coup ça avance. De quoi s’agacer. Rien de pire que de voir son concurrent le plus proche s’échapper sans rien pouvoir faire…

Résultat de ce marasme : des changements de leaders incessants. Skipper Macif, Gedimat et Bellocq Paysages –Saveurs de Cornouaille se partagent la tête du classement, qui pour l’heure ne veut rien dire du tout ! Si deux options se sont dessinées dès la nuit dernière entre les partisans de l’ouest (Agir Recouvrement, Generali…) et ceux du sud (Skipper Macif, Gedimat, Generali…), on ne pourra compter les points que lorsque le vent du nord soufflera. Même les marins ont des doutes ! Dans l’ouest, on espère toucher le vent en premier, dans le sud, on prie pour que la zone perturbée quitte rapidement les parages.

En fin d’après-midi, le souffle du nord redonnera des couleurs aux speedomètres des Figaro Bénéteau 2 : 12-15 nœuds, de quoi filer vers le cap espagnol, qu’ils devraient atteindre dans la nuit de mardi à mercredi. Ce soir au dernier classement de 19h, il est fort à parier que tous regarderont leur position. Et s’ils se retrouvaient à égalité ?

La phrase du jour : « Pour le choix de route, il fallait y aller assez tôt. Mais, là, on se pose la question si c’était une bonne idée ou pas ! » Xavier Macaire, Bretagne – CMB Performance »

 

ILS ONT DIT

Benjamin Augereau, Marie Galante « Ca été compliqué, il y a eu du vent très fort, jusqu’à 35 nœuds en rafales. On était au près serré. Il y a eu la bascule à gérer. C’était une nuit mouvementée. Il fait encore très froid, ça caille grave. Nous sommes quand même contents, parce que nous sommes encore présents au contact avec les bateaux, donc, c’est bien. On a pu faire quelques tranches de sommeil, on est plus ou moins reposés. Depuis ce matin, le vent nous a abandonnés. Nous sommes passés de 25 à 6 nœuds. C’est un peu le jeu du poker entre les nuages, il faut gérer les bascules de vent. Nous avions choisi cette stratégie, et en cours de nuit on a essayé de marquer à la culotte. Avant que vous m’appeliez j’étais en train de dormir. Kéni est à la barre. On fait des quarts de 2 h chacun en moyenne. On s’amarine doucement, on essaye de manger correctement, de boire régulièrement. Normalement, la bascule avec les vents de nord devrait avoir lieu ce soir ou dans la nuit.»

Tolga Pamir, Free Dom Services à Domicile « Ça va, ça va. On essaye de récupérer de la nuit. Les conditions étaient un peu fortes, un peu agitées et maintenant c’est la pétole. On a été malade tous les deux. »

Xavier Macaire, Bretagne – CMB Performance  « Ça ne va pas très bien. Nous sommes « empétolés » et nous voyons les autres avancer à 5 nœuds. Ca fait une demi-heure que nous sommes à 1 nœud. C’est un peu énervant. Cette nuit a été agitée, avec beaucoup de vent, des grains. On a eu plus fort que ce qu’on pensait et plus longtemps que ce qu’on imaginait. On est trempés, et on n’a pas beaucoup dormi, c’était limite le mal de mer par moment quand on devait faire des trucs à l’intérieur du bateau, matosser, faire la navigation. On est content que le soleil revienne et que ça se calme un peu, mais ça se calme un peu trop ! Ce n’est pas très clair, cette pétole peut durer une heure comme 4 ou 5 heures. Mais alors voir les copains avancer à 5 nœuds sous un nuage, c’est vraiment énervant… On ne peut que subir. Les bateaux ne sont pas assez rapides pour aller chercher les nuages. Sébastien barre en ce moment. Moi, j’ai fait du rangement, j’ai fait le petit déjeuner avec tartines de Nutella. Notre position était voulue, on voulait passer par en-dessous de la molle. Il fallait y aller assez tôt, un peu comme Skipper Macif et Gedimat. Mais, on se pose la question si c’était une bonne idée ou pas.»

Nicolas Lunven, Generali « On a eu du vent soutenu toute la nuit et là, ça c’est complètement cassé la figure et ça tourne dans tous les sens avec beaucoup de houle. Le plan d’eau est chaotique. On se bat tant bien que mal pour faire avancer Generali, mais ce n’est pas simple. Nous avons 4 nœuds de vent en ce moment. Nous sommes positionnés les plus à l’ouest de la flotte. En fait, la séparation de la flotte s’est faite en début de nuit quand tout le monde a viré. Nous n’avons peut-être pas eu le même vent que les autres. Notre position n’est pas forcément voulue, nous nous sommes naturellement décalés dans l’ouest. On verra le résultat ce soir quand le vent de nord commencera à rentrer. »

Hervé Aubry, Cuisines Ixina  « Il n’y pas trop de vent en ce moment, la nuit a été agitée. Il y avait 26 nœuds de vent avec des claques, avec beaucoup de mer. C’était un peu sport, mais globalement on s’est mis dedans très vite. Nous avons été tous les deux un petit peu malade. C’est à la recherche du vent perdu, on passe du temps sur la table à cartes pour comprendre ce qu’il se passe. Mais ça avance un peu, on avance à 4 – 5 nœuds. Nous sommes dans une phase de transition, je pense que notre salut est dans l’ouest. Nous mangeons notre pain noir, mais très clairement notre option nous fait penser que le salut viendra de là. L’ambiance est excellente, mon Tanguy ronfle en ce moment et j’essaye de rester à la table à cartes pour concentrer les poids. Le bateau est sous pilote. Ce soir, nous devrions mettre le spi sur un bord un peu serré qui nous rapproche du cap Finisterre, et petit à petit, nous allons nous rapprocher de la côte et de la pointe espagnole. On a fait ce qu’on voulait faire. Ca c’est bien ! Même si nous ne sommes pas sûrs que ce soit l’option gagnante. »

LE CLASSEMENT 4 AVRIL 16H00
1-BELLOCQ PAYSAGES SAVEURS DE CORNOUAILLE (Martin Le Pape-Eric Peron) à 3713,49 milles
2-GEDIMAT (Thierry Chabagny-Erwan Tabarly) à 0,61 milles du 1er
3-SKIPPER MACIF (Charlie Darlin-Yoann Richomme) à 1,08 milles
4-GENERALI (Nicolas Lunven-Gildas Mahe) à 5,26 milles
5-AGIR RECOUVREMENT (Adrien Hardy-Vincent Biarnes) à 7,27 milles