Groupama 3 au sud des canaries

Groupama 3 - Franck Cammas
DR

« Ca s’en va et ça revient… », la chanson de Claude François caractérise bien cette fin de week-end au large des Canaries ! Un coup de l’air, un coup des calmes, le tout dans une atmosphère chargée de nuages qui fait dire à Franck Cammas : « Ce n’est pas très simple sur l’eau : on dirait que nous sommes dans un Pot au Noir depuis hier ! Des grains nous ont fait avancer vite la nuit dernière mais ils étaient très instables avec des sautes de vent passant de trente à trois noeuds et 60° de bascule… Vivement que nous touchions des alizés plus établis. Ici, le ciel est très nuageux car nous sommes dans l’axe d’une dorsale proche d’une dépression. On essaye de slalomer entre les grains. »

- Publicité -

Cette zone orageuse est la conséquence de la perturbation qui avait déjà provoqué ces plaques de calmes avant l’archipel canarien. Groupama 3 n’en subira plus les effets qu’une fois à la latitude du Cap Blanc (Nouadhibou, frontière Maroc-Mauritanie), normalement avant le coucher du soleil ce dimanche. Ensuite, les alizés de secteur Est à Nord-Est vont heureusement s’installer plus durablement même s’ils ne seront pas très puissants, entre 15 et 20 noeuds. L’avantage de cette orientation du vent sera toutefois important car Franck Cammas et ses neuf équipiers vont pouvoir faire cap vers le Sud-Ouest afin de déborder le Cap Vert à l’Ouest.

Encore des reliefs perturbateurs
Car, comme les Canaries, l’archipel est très étendu en longitude (180 milles) et en latitude (150 milles), avec des montagnes qui atteignent près de 2 000 mètres à Santo Antao (île la plus au Nord-Ouest de l’archipel) ! Là encore, les dévents et les perturbations de la brise s’étendent sur plusieurs dizaines de milles sous le vent et Groupama 3 devra s’écarter au-delà du 26° Ouest pour ne pas trop en subir ces effets… La route du trimaran géant était d’ailleurs significative dimanche en milieu d’après-midi, indiquant que le navigateur et le skipper optaient pour un grand « arrondissement » de ces îles volcaniques.

Cette première moitié de journée de dimanche a été caractérisée par une progression en yoyo assez éprouvante, pour les nerfs comme pour les corps. Il a fallu beaucoup manoeuvrer pour adapter la voilure à ces changements incessants de brise. Mais d’ici quelques heures, Franck Cammas et ses hommes devraient retrouver des vitesses plus élevées.Gageons que ce début de semaine sera plus véloce avec le retour des alizés et, alors que Groupama 3 possède toujours un « coussin » de 200 milles de marge sur Orange II, il est probable qu’il se transforme en « matelas » dès mardi matin…
A 1 300 milles de l’équateur, l’objectif de franchir la ligne de changement d’hémisphère en moins de six jours est toujours d’actualité !

Le tout pour le tour : l’analyse météo de Sylvain Mondon
« Dimanche 27 janvier au matin l’équipage de Groupama 3 luttait encore avec les derniers résidus de grains de la dépression orageuse plus à l’Ouest. C’est avec ce système que le maxi trimaran a dû composer sa route depuis samedi soir. L’alternance de surventes et de zones déventées a produit ainsi une progression par à-coups. Cette configuration est très éprouvante nerveusement et nécessite de fréquentes manoeuvres. Heureusement, le flux d’alizé n’est plus très loin, Franck Cammas et son équipage pourront enfin bénéficier de vents plus réguliers dimanche en fin après-midi. Ce sont ces alizés de Nord-Est d’une vingtaine de noeuds qui porteront Groupama 3 vers la zone de convergence intertropicale dans les prochains jours.»

Au jour le tour : les interviews du jour
Franck Cammas, skipper de Groupama 3 : « L’intérêt de cette fenêtre météo, est que notre trajectoire est assez rectiligne car le vent est bien orienté, mais malheureusement très instable en force… Et la mer de face ne facilite pas notre progression. Avec Yves Parlier, nous regardons beaucoup les images satellites pour observer la couche nuageuse mais parfois, nous n’avons pas trop le choix et nous nous retrouvons dans des trous de vent avec beaucoup de manoeuvres à faire : ce matin, nous sommes passés de deux ris trinquette à grand voile haute gennaker en une heure ! Des journées comme celle-là nous permettent tout de même de nous aguerrir et les manoeuvres deviennent de plus en plus fluides : c’est bon pour la suite ! On a encore progressé, tant à la barre qu’en réglages et en manoeuvres… Ici, c’est un peu le désert sur l’eau depuis hier au moment du passage des Canaries. C’est grisâtre, un peu comme au départ de Ouessant… A part la température qui est plus agréable, on se croirait en Bretagne ! Nous avons ce midi encore 150 milles à parcourir pour retrouver une bonne glisse, mais ce ne sont pas des alizés très forts. Les 200 milles d’avance sur Orange II sont toujours bons à prendre car c’est motivant d’être dans le coup. Les problèmes de hook sont en partie résolus et nous sommes contents de ne pas être pénalisé par ce souci. »